BGE 101 IA 124 vom 19. Februar 1975

Datum: 19. Februar 1975

BGE referenzen:  124 I 11, 124 I 25, 132 I 282

Quelle: bger.ch

Urteilskopf

101 Ia 124


23. Extrait de l'arrêt du 19 février 1975 en la cause Chambre fribourgeoise des agents généraux d'assurances et Pierre Devaud contre Conseil d'Etat du canton de Fribourg.

Regeste

Art. 31 BV ; obligatorische Schulversicherung; Monopol zugunsten einer öffentlichen Versicherungskasse.
1. Beschwerdelegitimation des Vereins der Versicherungsgeneralagenten (E. 2).
2. Errichtung eines Monopols zugunsten einer öffentlichen Versicherungskasse im Falle der obligatorischen Schulunfallversicherung (E. 8).

Sachverhalt ab Seite 125

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La loi fribourgeoise du 18 novembre 1971 a créé une "assurance scolaire contre les accidents". Sont assurés les enfants et adolescents qui fréquentent diverses écoles publiques ou privées ou qui, pour des raisons de santé ou d'invalidité, ne peuvent suivre l'école. L'assurance scolaire contre les accidents garantit à titre complémentaire et subsidiaire les soins médicaux, hospitaliers et dentaires, ainsi que des indemnités d'invalidité et de décès. Selon l'art. 5 de la loi, la Mutualité scolaire, caisse publique d'assurances au sens de l'art. 2 al. 1 lit b LAMA, est chargée de l'institution de l'assurance. Elle confie à une compagnie d'assurances privée la couverture des indemnités d'invalidité et de décès. Les parents supportent le 50% des primes, le solde étant pris en charge à raison de 25% par l'Etat et de 25% par les communes.
Le Conseil d'Etat adopta le 17 septembre 1973 le règlement d'exécution de la loi. Il autorisa les caisses-maladie et accidents et les compagnies d'assurances à pratiquer l'assurance scolaire obligatoire contre les accidents; toutefois, seul le 50% des primes dues à la Mutualité scolaire par des assurés dont les parents étaient domiciliés sur le territoire du canton était pris en charge par l'Etat.
Agissant par la voie du recours de droit public, la Chambre fribourgeoise des agents généraux d'assurances et Pierre Devaud ont requis le Tribunal fédéral d'annuler le règlement du 17 septembre 1973. La Chambre fribourgeoise des agents généraux d'assurances soutient notamment qu'en mettant le 50% des primes à la charge de l'Etat dans le cas seulement où l'assuré est affilié à la Mutualité scolaire, le Conseil d'Etat a créé un monopole de fait en faveur de cette institution, sans tenir compte des caisses de secours existantes. Elle estime que ce monopole, de type purement fiscal, est contraire à l'art. 31 Cst. Pierre Devaud se plaint notamment de la violation du principe de la séparation des pouvoirs et se dit lésé dans ses droits politiques en ceci que le Conseil d'Etat a institué un monopole que seule une loi soumise au référendum aurait pu créer.
Le Tribunal fédéral a rejeté les recours en tant qu'ils étaient recevables.
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Erwägungen

Considérant en droit:

2. a) D'après ses statuts, la Chambre fribourgeoise des agents généraux d'assurances est une association des art. 60 ss CC qui a pour but de sauvegarder les intérêts de ses membres, en particulier de participer activement à la législation fédérale et cantonale, avant tout dans le domaine des assurances et de l'imposition fiscale. Selon la jurisprudence, une association professionnelle qui a un tel but peut agir par la voie du recours de droit public sans être elle-même touchée par l'acte attaqué, à la condition que ses membres soient personnellement lésés par cet acte, du moins en majorité ou en grand nombre (RO 100 Ia 99, consid. b et les arrêts cités).
Le Conseil d'Etat conteste en l'espèce que les agents généraux d'assurances affiliés à l'association recourante soient personnellement lésés par le règlement attaqué. Il soutient que l'intérêt des agents généraux est purement économique, le règlement litigieux ne les empêchant pas en droit de pratiquer l'assurance scolaire contre les accidents. Il considère en outre que ce sont tout au plus les compagnies d'assurances elles-mêmes qui pourraient juridiquement se prétendre lésées, et non pas leurs agents généraux.
La première de ces deux objections est manifestement mal fondée. C'est en effet du fond que relève la question de savoir si le règlement attaqué crée un monopole en faveur de la Mutualité scolaire et, dans l'affirmative, si ce monopole est contraire à la constitution. Il suffit que les recourants le prétendent pour qu'ils puissent recourir.
La seconde objection du Conseil d'Etat soulève une question que le Tribunal fédéral a laissée ouverte dans un cas semblable, où il s'agissait d'un recours formé notamment par la Chambre genevoise des agents généraux d'assurances contre un règlement conférant à une Caisse publique un prétendu monopole en matière d'assurance scolaire contre les accidents (RO 93 I 38 ss, 46). Cette question doit être tranchée en l'espèce. En effet, la Chambre fribourgeoise des agents généraux d'assurances est seule recourante pour le recours qu'elle a intenté et elle pouvait seule invoquer la violation de l'art. 31 Cst. Les agences générales des compagnies privées d'assurances sont de deux sortes: les agences autonomes, qui forment chacune une entreprise exploitée par l'agent, et les
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agences en régie, qui sont des sortes de succursales. Dans le premier cas, l'agent a un intérêt juridique personnel, en tant qu'entrepreneur, à ce que certaines garanties constitutionnelles soient respectées, en particulier la liberté du commerce et de l'industrie. Dans le second cas, ce même intérêt est au premier chef celui de la compagnie d'assurances, mais on peut admettre que l'agent la représente dans son rayon d'activité et pour les questions dont la portée se limite à ce rayon, ce qui est le cas en l'espèce. La recourante affirme d'ailleurs, à vrai dire sans le prouver, que le présent recours a été formé avec l'accord exprès des compagnies d'assurances intéressées.
La qualité pour recourir de la Chambre fribourgeoise des agents généraux d'assurances doit dès lors être admise.
b) Selon le Conseil d'Etat, Pierre Devaud est agent général de la Compagnie privée d'assurances auprès de laquelle il a assuré ses enfants contre les accidents. Ce n'est cependant pas à ce titre qu'il agit. Ainsi qu'il le dit clairement dans son recours, c'est en qualité de citoyen actif du canton de Fribourg et de preneur d'assurance pour ses trois enfants. En vertu de la première de ces deux qualités, il pouvait sans autre condition se plaindre, ainsi qu'il le fait, de violation de la séparation des pouvoirs et d'atteinte au droit de référendum, sur la base de l'art. 85 lit. a OJ. En tant que preneur d'assurance, il était fondé à se plaindre d'une éventuelle inégalité de traitement, comme aussi d'une atteinte à sa liberté contractuelle préjudiciable à ses intérêts, tels qu'il les conçoit. Le point de savoir si ces griefs sont fondés ou non relève du fond.

8. a) En 1919, le législateur fribourgeois a institué pour les élèves des écoles primaires l'assurance obligatoire contre la maladie. Cette assurance a été par la suite étendue aux autres élèves. Dans son message du 22 octobre 1971 accompagnant le projet de loi créant une assurance scolaire contre les accidents, le Conseil d'Etat a mis en lumière les insuffisances du régime alors en vigueur, en particulier en ce qui concernait la couverture des risques d'accidents. Il a souligné que, dans tous les cantons, à l'exception de celui de Fribourg, les élèves de tous les degrés de scolarité étaient couverts, grâce à des mesures d'ensemble, contre ces risques. Il a également fait état de la responsabilité des collectivités publiques pour les accidents liés à la fréquentation des écoles (Bulletin officiel du Grand Conseil, 1971, IVe cahier, p. 1336/1337). En instituant l'assurance
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scolaire obligatoire contre les accidents, le législateur a entendu combler les lacunes du système d'assurance sociale des élèves des écoles fribourgeoises. L'intérêt public justifiait certainement une telle décision.
b) Pour atteindre le but visé, le législateur a créé un monopole de droit en faveur de la Mutualité scolaire, caisse publique d'assurances. Il a ainsi mis en balance les intérêts de l'Etat à la réalisation et à l'exécution de cette assurance, ceux des assurés ainsi que ceux des autres caisses-maladie et compagnies d'assurances qui pratiquent l'assurance scolaire obligatoire. Le Tribunal fédéral ne peut revoir qu'avec retenue le résultat de cette pesée des intérêts, car il ne lui appartient pas de substituer son appréciation à celle de l'autorité cantonale sur une question dont la solution dépend des conditions locales. Il n'interviendra en l'espèce que si l'institution d'un monopole apparaît comme un moyen disproportionné pour atteindre le but d'intérêt public que le législateur s'est fixé (RO 96 I 207/208).
L'assurance scolaire obligatoire créée par la loi du 18 novembre 1971 couvre tous les risques d'accidents; elle s'étend donc aux accidents survenant en dehors des activités scolaires. Le législateur a en effet considéré que toutes les activités des élèves sont à ce point interdépendantes qu'il n'était guère possible de les dissocier ou d'en limiter la portée du risque. La création d'une assurance unique évitait ainsi toute discussion sur la question de savoir dans quelle mesure et par qui les risques d'accidents étaient couverts. Les assurés, comme leurs familles, ne pouvaient qu'en tirer avantage. Un monopole devait par ailleurs faciliter l'exécution de la loi et le contrôle de l'assujettissement de tous les élèves à l'assurance contre les accidents. Le fait que la responsabilité des collectivités publiques est engagée pour une part relativement importante des risques d'accidents courus par les enfants en âge de scolarité militait également en faveur de la création d'un monopole. Enfin, l'exécution de l'assurance scolaire contre les accidents par une seule caisse publique, qui assure ses membres selon le principe de la mutualité, devait permettre d'obtenir des conditions d'assurance plus avantageuses, ce qui est dans l'intérêt tant de l'Etat, qui prend à sa charge une partie des primes, que des assurés et de leurs parents. Le subventionnement de cette assurance par les collectivités publiques conduisait également
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à l'adoption d'une solution qui évite toute complication.
Ces motifs sont certainement suffisants pour que l'on puisse admettre la création d'un monopole de droit en faveur de la Mutualité scolaire. Si celle-ci n'est pas la seule solution possible pour atteindre le but d'intérêt public que le législateur s'est fixé, elle ne constitue pas un moyen disproportionné, compte tenu notamment du fait que l'assurance scolaire contre les accidents ne peut être considérée comme un complément de l'assurance-maladie obligatoire, au sens de la LAMA.
c) Les motifs qui conduisent à l'admission d'un monopole de droit en faveur de la Mutualité scolaire permettent de conclure à l'admissibilité du monopole tel qu'il a été aménagé par le règlement d'exécution de la loi. La recourante soutient certes que celui-ci vise des fins purement fiscales. Mais cet argument ne peut être retenu au regard de la définition du monopole fiscal, telle que la jurisprudence l'a établie (RO 95 I 150/151).
La Chambre des agents généraux d'assurances ne peut ainsi se plaindre d'une violation de l'art. 31 Cst. Elle ne saurait en particulier exiger des collectivités publiques qu'elles prennent à leur charge une partie des primes dues par les assurés, pas plus qu'elle ne peut demander une répartition en faveur de ses membres de la part des primes dont le paiement incombe aux pouvoirs publics.

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