Urteilskopf
101 IV 327
77. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 5 décembre 1975 dans la cause Magnin contre Ministère public du canton de Vaud.
Regeste
Art. 90 Ziff. 2 SVG
. Strafmass. Eine Strafe von zwei Monaten Gefängnis ist gegenüber einem Fahrzeugführer, der ungeachtet einer Vorstrafe von 2 Monaten Gefängnis wegen eines Verkehrsdelikts wieder mehrere Verkehrsregeln grob verletzt, nicht willkürlich hart (Erw. 1).
Art. 41 StGB
. Bedingter Strafvollzug. Die Besserungsaussichten müssen auf Grund der Gesamtheit des Verhaltens und der Gesinnung des Verurteilten beurteilt werden. Auch wenn die Tatumstände für sich allein zur Verweigerung des Strafaufschubes nicht genügen, können sie ein Anzeichen für Rücksichtslosigkeit bilden; wird ein solches Indiz durch das Vorleben verstärkt, kann kaum eine günstige Prognose gestellt werden (Erw. 2c und d).
A.-
Le 26 février 1975, au volant d'un fourgon VW sur la route principale Lausanne-Estavayer, Philippe Magnin a opéré à deux reprises un dépassement à l'entrée d'un virage à
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droite, alors que la visibilité était restreinte et qu'une ligne de sécurité continue était tracée sur la chaussée; il a roulé complètement à gauche de la ligne de sécurité pendant plusieurs dizaines de mètres. Il a par ailleurs circulé à 80-90 km/h dans un secteur où la vitesse est limitée à 70 km/h. Enfin, il a traversé le village de Cugy à près de 90 km/h alors que la vitesse y est limitée à 60 km/h.
De 1965 à 1972, Magnin a été condamné à six reprises à des amendes pour des infractions à la LCR. Le 22 janvier 1974, il a été condamné à 2 mois d'emprisonnement et à 300 fr. d'amende pour violation des règles de la circulation au guidon d'une motocyclette et homicide par négligence. Après cette condamnation, il a encore encouru une amende de 100 fr., pour excès de vitesse, le 31 janvier 1975. Le 2 avril 1975, le Service des automobiles lui a retiré son permis pour une durée indéterminée et il en a subordonné la restitution éventuelle à un examen psychiatrique et à la réussite d'une épreuve théorique et pratique de conducteur.
B.-
Le 24 juin 1975, le Tribunal de police du district de Lausanne a condamné Magnin, pour violations graves des règles de circulation, à la peine de deux mois d'emprisonnement avec sursis pendant cinq ans.
Le Ministère public vaudois et Magnin ont tous deux recouru devant le Tribunal cantonal, le premier demandant que le sursis soit refusé, et le second concluant à une peine d'amende, subsidiairement d'arrêts avec sursis. Le 13 août 1975, le Tribunal cantonal vaudois a admis le recours du Ministère public et rejeté celui de Magnin. Magnin est ainsi condamné à la peine de deux mois d'emprisonnement ferme.
C.-
Magnin se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Il conclut à la réduction de la peine et à l'octroi du sursis.
Le Ministère public propose de rejeter le pourvoi.
Considérant en droit:
1.
Le recourant admet qu'il a été condamné à bon droit en application de l'art. 90 ch. 2 LCR mais il critique la quotité de la peine qu'il considère comme arbitrairement sévère.
En matière de fixation de la peine, la Cour de cassation ne peut intervenir que lorsque le juge du fait a excédé son pouvoir d'appréciation, c'est-à-dire s'il a rendu un jugement manifestement
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insoutenable, d'une sévérité (ou d'une clémence) arbitraire (cf. BONNARD, in RPS (74) p. 205). Elle peut intervenir en outre lorsque la peine a été fixée en fonction de considérations juridiques inexactes (RO 92 IV 119 ss).
Au vu des éléments de la cause, on ne saurait considérer comme arbitraire la peine de deux mois d'emprisonnement infligée au recourant. Eu égard au maximum de trois ans prévu a l'art. 90 ch. 2 LCR, à la gravité des fautes commises et aux antécédents du recourant, il saute aux yeux que les juges cantonaux n'ont nullement outrepassé leur pouvoir d'appréciation. Au contraire, les graves dangers que le recourant a fait courir aux autres usagers de la route, joints au fait qu'il avait déjà été condamné à deux mois d'emprisonnement à peine plus d'un an auparavant pour infraction de circulation et homicide par négligence, suffisent à justifier, pour le moins, la peine en cause.
2.
a) Le recourant critique ensuite le refus du sursis en alléguant que son permis de conduire lui a été retiré pour une durée indéterminée et que la restitution en est subordonnée à un examen psychiatrique.
b) Pour que le sursis puisse être accordé, il faut notamment, selon l'art. 41 ch. 1 CP, que les antécédents et le caractère du condamné fassent prévoir que cette mesure le détournera de commettre d'autres crimes ou délits. Savoir si dans un cas donné une telle prévision se justifie est une question d'appréciation dans laquelle la Cour de cassation du Tribunal fédéral, saisie d'un pourvoi en nullité, n'intervient que si la juridiction cantonale a outrepassé son pouvoir d'appréciation, c'est-à-dire lorsque son pronostic repose sur un raisonnement manifestement insoutenable (RO 100 IV 194).
c) L'arrêt attaqué considère que les antécédents d'automobiliste du recourant démontrent qu'au volant il est dangereux et totalement dénué de scrupules; que sa condamnation antérieure pour homicide par négligence ne lui a pas fait prendre conscience de la nécessité qu'il avait de modifier son comportement; que seule une peine ferme permet d'espérer la prise de conscience qui le détournera de récidiver; que la suppression du risque permanent constitué par le recourant pour les usagers de la route ensuite du retrait de son permis de conduire n'enlève rien à son caractère de conducteur incorrigible; que l'on ne saurait inférer d'une mesure administrative
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que les conditions subjectives de sursis sont réalisées du seul fait que la récidive paraît matériellement impossible, un tel argument revenant à dénier le but expiatoire de la peine qui doit pourtant être pris en considération.
Les motifs exposés par la cour cantonale sont insoutenables et complètement étrangers au sens et au but de l'art. 41 CP si, comme on peut le lire dans l'arrêt, l'absence de scrupules du recourant n'est réellement démontrée que pour ses actes au volant. Dans ce cas en effet, l'interdiction de conduire et l'impossibilité matérielle de récidiver (sous-entendu au volant) interdiraient de faire sérieusement un pronostic défavorable au sens de l'art. 41 CP, puisque les autres éléments figurant dans l'arrêt sur le plan subjectif ne permettent pas de poser un pronostic défavorable quant au risque que le recourant puisse commettre d'autres infractions qu'au volant. De même que les perspectives d'amendement ne sauraient, pour justifier l'octroi du sursis, se limiter à certaines activités délictueuses et qu'elles doivent porter sur l'attitude et la mentalité globale du condamné (RO 91 IV 59/60), de même l'élimination du risque de récidive spéciale est sans pertinence, quant à l'application de l'art. 41 CP, à défaut d'une appréciation de l'attitude et de la mentalité globale de l'intéressé.
d) L'arrêt attaqué n'en doit pas pour autant être annulé, dès lors que les constatations de faits qu'il contient sont suffisantes pour permettre d'établir que l'application stricte du droit conduit à en confirmer le résultat. En effet, l'erreur affectant seulement les motifs de l'arrêt - question de la déclaration de culpabilité réservée - ne permet pas de fonder le pourvoi en nullité (RO 81 IV 75, 305;
84 IV 110
;
85 IV 134
;
87 IV 21
;
90 IV 195
;
96 IV 66
).
Ce qui importe avant tout pour apprécier si le sursis peut être accordé, ce sont les perspectives d'amendement durable du condamné telles qu'on peut les déduire de ses antécédents et de son caractère. Le pronostic doit être posé sur la base des éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère du condamné (RO 100 IV 10;
98 IV 161
et arrêts cités).
Si, contrairement à une jurisprudence trop schématique et aujourd'hui abandonnée (RO 91 VI 115/116), les circonstances de l'infraction ne permettent pas à elles seules de refuser le sursis (RO 98 IV 161; arrêt non publié Dupertuis, 18 avril 1975), elles peuvent être l'indice de l'absence de scrupules.
BGE 101 IV 327 S. 331
Or si les antécédents du condamné corroborent un tel indice et le renforcent, le sursis ne pourra guère être accordé (RO 96 IV 104). A cet égard, la récidive spéciale du recourant, qui a commis de graves infractions de circulation à peine un an après une condamnation pour homicide par négligence dans le cadre de la circulation, révèle un défaut de caractère tel qu'il interdit l'établissement d'un pronostic d'amendement favorable sur un plan général (RO 100 IV 132; Montavon, 10 octobre 1975, consid. 2b). Peu importe dès lors que le risque de récidive spéciale paraisse quant à lui exclu pour l'avenir. Celui qui, comme le recourant, est capable de jouer avec la vie d'autrui en effectuant des dépassements au-delà d'une ligne de sécurité, dans des virages sans visibilité, et qui de surcroît traverse des localités à des vitesses nettement exagérées, manifeste le comportement d'un individu dénué de tout scrupule. Comme le diagnostic est corroboré par les antécédents du recourant, c'est-à-dire par ses nombreuses contraventions en matière de circulation et par sa récente condamnation pour homicide par négligence, comme aucun élément véritablement déterminant ne vient l'infirmer, et comme l'interdiction de conduire ne crée pas en fait une impossibilité matérielle de récidiver, seul peut être posé un pronostic défavorable excluant le sursis. Le fait que les renseignements généraux recueillis sur le compte du recourant ne sont pas mauvais ne suffit pas à renverser un tel pronostic; il aurait fallu pour cela des circonstances exceptionnelles ou des renseignements particulièrement positifs.
L'arrêt attaqué étant justifié quant à son résultat, le pourvoi doit être rejeté.