BGE 102 II 413 vom 14. Dezember 1976

Datum: 14. Dezember 1976

Artikelreferenzen:  Art. 127 CO, Art. 371 CO , Art. 371 Abs. 2 OR, Art. 367 ff. OR, art. 371 CO, Art. 367-371 OR, art. 127 CO

BGE referenzen:  89 II 405, 134 III 361 , 89 II 405, 89 II 407

Quelle: bger.ch

Urteilskopf

102 II 413


60. Arrêt de la Ire Cour civile du 14 décembre 1976 dans la cause Commune X. contre Y.

Regeste

Art. 371 Abs. 2 OR .
Die Verjährungsfrist von fünf Jahren betrifft nur die Klage wegen Mängeln eines unbeweglichen Bauwerkes. Sie bezieht sich nicht auf Schadenersatzansprüche gegen den Unternehmer, den Architekten oder den Ingenieur wegen Vertragsverletzungen, aus denen keine Mängel im Sinne der Art. 367 ff. OR entstehen.

Sachverhalt ab Seite 413

BGE 102 II 413 S. 413
En vue de la création d'un réseau communal d'égouts, en rapport avec une entreprise d'améliorations foncières, la commune X. a désigné Y., ingénieur et géomètre officiel, en qualité de technicien de cette entreprise et l'a chargé de l'étude du réseau d'égouts. Elle a confié l'exécution des travaux de canalisation à l'entrepreneur M. Ces travaux ont été achevés pour l'essentiel en 1964.
L'entreprise M. a présenté sa facture pour l'ensemble des travaux le 21 juin 1965. Y. a reconnu l'exactitude de ce décompte le 29 juin et il en a informé le 30 juin la commune X. Il avait lui-même remis le 22 juin à la commune sa propre note d'honoraires.
Le 6 août 1971, la commune X. a introduit contre Y. une poursuite portant sur 140'581 fr. Elle a ouvert action, par demande du 21 mars 1973, en paiement de 140'000 fr. avec intérêt à 5% dès le 6 août 1971, ramenant par la suite ses conclusions à 11'842 fr. avec intérêt.
Le défendeur a conclu à libération, en invoquant la prescription.
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Par jugement du 25 juin 1976, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois, admettant l'exception de prescription, a rejeté la demande.
La demanderesse recourt en réforme au Tribunal fédéral en concluant au paiement de 10'943 fr. 31 avec intérêt à 5% dès le 6 août 1971.

Erwägungen

Considérant en droit:

1. a) Le jugement déféré constate que l'action de la demanderesse était primitivement fondée essentiellement sur de prétendus défauts de l'ouvrage, savoir la réalisation du réseau communal d'égouts. Les conclusions relatives à ces défauts ont toutefois été retirées pour ne laisser subsister que celles qui concernent les fautes imputées au défendeur dans le contrôle des factures de l'entrepreneur M.
Dans son recours, la demanderesse précise que les prétentions soumises au Tribunal fédéral se composent de deux postes: le premier se rapporte "au paiement à double du "tout venant" du remblayage des fouilles" par 6'418 fr. 78, ce paiement en trop à l'entreprise résultant d'une faute du défendeur. Quant au second poste, il s'agit d'un montant de 4'524 fr. 53 que la commune a payé en trop à l'entrepreneur à la suite d'un calcul opéré par le défendeur contrairement à une convention passée par les parties au sujet des fouilles.
b) Le Tribunal cantonal a jugé que l'action de la demanderesse était soumise au délai de prescription de cinq ans de l' art. 371 al. 2 CO , cette disposition étant applicable en raison d'erreurs affectant aussi bien la construction dont il s'est occupé que d'autres de ses activités, par exemple la vérification des factures. Les travaux exécutés par l'entrepreneur M. ayant été reçus en tout cas le 29 juin 1965, lorsque le décompte final établi par cet entrepreneur a été reconnu exact par le défendeur, la prescription de cinq ans était acquise au moment de la notification de la poursuite, le 6 août 1971.

2. Aux termes de l' art. 371 al. 2 CO , l'action du maître en raison des défauts d'une construction immobilière se prescrit contre l'entrepreneur, de même que contre l'architecte ou l'ingénieur qui a collaboré à l'exécution de l'ouvrage, par cinq ans à compter de la réception. Le Tribunal cantonal admet que, "pris à la lettre", le texte de cette disposition vise seulement l'action du maître dérivant des défauts de l'ouvrage, et
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ne s'applique pas aux actions fondées sur un autre grief. A l'appui de son interprétation extensive, il invoque toutefois la jurisprudence du Tribunal fédéral ( ATF 89 II 405 ss; arrêt non publié Benguerel c. Meystre et consorts, du 22 juin 1918), "fondée d'une part sur la ratio legis de la loi, d'autre part sur la difficulté qu'il y aurait en pratique à distinguer ce qui relève des défauts et ce qui leur est étranger".
a) L'arrêt ATF 89 II 405 ss concerne une action en dommages-intérêts intentée à l'architecte et aux entrepreneurs à la suite de défauts d'une construction immobilière. Le maître de l'ouvrage reprochait à l'architecte d'avoir mal examiné la nature du terrain, de n'avoir pas pris les mesures pour parer aux infiltrations d'eau et d'avoir négligé la surveillance des travaux. Le Tribunal fédéral considère que le texte même de l' art. 371 al. 2 CO vise la contribution de l'architecte, sans distinguer selon les services rendus ou le contrat conclu. Confirmant le point de vue adopté dans l'arrêt Benguerel, du 22 juin 1918 (consid. 1 in fine), il rejette la distinction préconisée par PORRET (RSJ 9 p. 387 s.) entre la garantie en raison des défauts de construction, qui se prescrirait par cinq ans, et celle dérivant de la conception des plans et de la vérification des comptes, qui se prescrirait par dix ans; selon cet auteur, la première est une responsabilité pour autrui, et le législateur a limité la prescription à cinq ans pour remédier à l'anomalie que constituait la différence entre les délais de prescription de l'action contre l'entrepreneur et de celle contre l'architecte ou l'ingénieur, ce dernier risquant ainsi d'être privé de son recours contre le premier. Le Tribunal fédéral tient la distinction de Porret pour malaisée en pratique et ne trouvant pas sa justification dans le texte légal. Se référant à OSER/SCHÖNENBERGER (n. 7 ad art. 371 CO ), il relève que la réduction du délai a été voulue de façon uniforme, et que le texte légal ne fait aucune distinction entre les services que l'architecte peut être appelé à rendre au maître de l'ouvrage; il serait très aléatoire, dans l'espèce soumise à la Cour, de diviser le dommage suivant que l'obligation inexécutée ressortissait au contrat d'entreprise ou au mandat.
b) De même que l'arrêt Benguerel de 1918, l'arrêt ATF 89 II 405 ss concerne une action en dommages-intérêts dirigée contre l'architecte - et contre l'entrepreneur - en raison de défauts d'une construction immobilière. En déclarant que le
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texte de l' art. 371 al. 2 CO "vise la contribution de l'architecte sans distinguer selon les services rendus ou le contrat conclu", le Tribunal fédéral fait allusion aux différentes activités de l'architecte, lorsqu'il assume "tout à la fois l'établissement des plans et la mise en mouvement, la surveillance et la revision des travaux". Il ne déclare toutefois pas le délai de prescription de cinq ans applicable à toutes les actions en dommages-intérêts, y compris celles qui ne dérivent pas de défauts de l'ouvrage; le délai n'est de dix ans, dit-il seulement, que lorsque l'entrepreneur, l'ingénieur ou l'architecte a intentionnellement dissimulé les défauts. Le Tribunal fédéral paraît également n'envisager que l'action fondée sur les défauts lorsqu'il écarte la distinction retenue par Porret en relevant qu'en l'espèce - où l'on reprochait à l'architecte d'avoir mal examiné la nature du terrain, de n'avoir pas pris les mesures pour parer aux infiltrations d'eau et négligé la surveillance des travaux -, "il serait extrêmement aléatoire, en pratique, de diviser le dommage suivant que l'obligation inexécutée ressortissait en soi au contrat d'entreprise ou au mandat". Quant au texte légal, également invoqué, le Tribunal fédéral ne dit nullement qu'il serait trop restrictif en parlant de l'action du maître "en raison des défauts d'une construction immobilière" ("wegen allfälliger Mängel des Werkes").
Dans la mesure où l'on voudrait néanmoins interpréter l'arrêt ATF 89 II 405 ss, et l'arrêt Benguerel auquel il se réfère, en ce sens que la prescription de cinq ans de l' art. 371 al. 2 CO s'appliquerait également aux prétentions du maître ne dérivant pas de défauts de l'ouvrage - par exemple à l'action fondée sur une vérification insuffisante des factures d'un entrepreneur -, on n'y trouverait en tout cas pas de motifs propres à justifier une telle dérogation au texte clair de la loi.
L'arrêt ATF 58 II 140 ss, également cité par l'arrêt ATF 89 II 407 , concerne l'application de la prescription décennale dans un cas où le maître de l'ouvrage avait été intentionnellement induit en erreur au sujet des défauts invoqués. Il n'autorise aucune déduction en l'espèce.
c) OSER/SCHÖNENBERGER (n. 7 ad art. 371), que cite le jugement déféré, exposent qu'en soumettant également à la prescription de cinq ans les architectes et ingénieurs, le législateur a voulu éliminer l'anomalie provenant du fait que ceux-ci
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pouvaient encore être attaqués pour des défauts de l'ouvrage, alors que l'action récursoire contre les entrepreneurs était prescrite. Mais, ajoutent les commentateurs, ce délai de prescription ne concerne pas seulement les prétentions qui permettent aux architectes et ingénieurs d'exercer une action récursoire; "eine solche Auffassung (SJ Porret S. 387) lässt sich durch den Wortlaut des Abs. 2 nicht begründen". OSER/SCHÖNENBERGER ne traitent donc ici que de l'action fondée sur des défauts de l'ouvrage; ils n'envisagent nullement que d'autres prétentions du maître de l'ouvrage contre l'architecte ou l'ingénieur soient également soumises à la prescription de cinq ans.
BECKER (n. 4 ad art. 371, citée par le jugement déféré; n. 5-7 ad art. 371) ne vise lui aussi que la prescription des actions issues des défauts de l'ouvrage. Le titre précédant les notes 4-7 ("Verjährung wegen Mängeln eines unbeweglichen Bauwerkes") l'indique clairement.
Quant à GAUTSCHI (n. 22 ad art. 371), il distingue expressément, parmi les manquements dont répondent les architectes ou ingénieurs, ceux qui sont à l'origine de défauts de l'ouvrage (erreurs dans l'élaboration des plans, la conception de l'ouvrage par rapport au terrain à bâtir, la direction et l'organisation de la construction; "Konstruktionsfehler") et ceux qui ne remplissent pas cette condition, mais concernent les comptes de construction, les mesures de sécurité ou l'adjudication des travaux, c'est-à-dire tout ce qui touche à la "Geschäftsbesorgung". Après avoir relevé une déclaration du conseiller aux Etats Hoffmann (Bull.stén. CE 1910 p. 228), selon laquelle seule l'action en responsabilité dérivant de défauts de l'ouvrage doit se prescrire par cinq ans, GAUTSCHI écrit ce qui suit:
"Der Ausschluss der Geschäftsbesorgung von Architekten und Ingenieuren aus der abgekürzten Verjährung und zwar nicht nur dann, wenn eine absichtliche Täuschung oder sogar ein Deliktsbestand (z.B. Verletzung der Regeln der Baukunde) gegeben ist, entspricht sowohl dem Randtitel zu Art. 367-371 OR "Haftung für Mängel" als auch dem Wortlaut von Art. 371 II OR, wo nur von Ansprüchen "wegen allfälliger Mängel" die Rede ist."
GAUTSCHI ajoute que l'arrêt ATF 89 II 407 s. a néanmoins ("trotzdem") admis que la prescription de cinq ans visait toutes les actions contre un architecte qui a collaboré à l'exécution
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d'une construction immobilière, "gleichgültig welcher Art die Dienste oder die Geschäftsbesorgung des Architekten oder Ingenieurs gewesen sei".
Dans ses notes 19 et 23 à l' art. 371 CO , citées par le jugement déféré - qui omet en revanche de mentionner la note 22 -, GAUTSCHI observe que la prescription de cinq ans s'applique à l'architecte ou à l'ingénieur indépendamment du fait qu'il est lié avec le maître de l'ouvrage par un contrat de travail ou de mandat (n. 19). Il relève en outre que les architectes et ingénieurs qui manquent à leurs obligations ne peuvent que rarement recourir contre les entrepreneurs et que, dans l'hypothèse où ceux-ci répondent du même défaut, il n'y a pas de solidarité entre l'architecte et l'entrepreneur, qui répondent en vertu de causes différentes (n. 23). Ces remarques n'infirment donc nullement le point de vue exprimé dans la note 22, à savoir que l' art. 371 al. 2 CO règle uniquement la prescription des actions dérivant des défauts de l'ouvrage.

3. Que l'on considère l' art. 371 al. 2 CO selon sa lettre ou selon la ratio legis, qui était d'éviter que l'architecte ou l'ingénieur ne doive répondre des défauts d'une construction immobilière alors qu'il ne peut plus se retourner contre l'entrepreneur, on ne saurait appliquer cette disposition à toute action du maître contre l'entrepreneur, l'architecte ou l'ingénieur fondée sur l'inexécution ou l'exécution défectueuse de leurs obligations contractuelles. La prescription de cinq ans concerne les prétentions dérivant des défauts - sauf si le maître a été induit en erreur intentionnellement -, sans égard à la qualification des rapports contractuels noués entre le maître de l'ouvrage et l'architecte ou l'ingénieur. Elle ne vise en revanche pas l'action en dommages-intérêts que le maître peut exercer contre l'entrepreneur, l'architecte ou l'ingénieur répondant d'une violation de leurs obligations contractuelles, mais sans qu'il en résulte des défauts au sens des art. 367 ss CO : ainsi en cas de retard dans l'exécution de l'ouvrage, ou de dommage causé lors de cette exécution à un arbre ou une autre construction du maître de l'ouvrage.
L' art. 371 al. 2 CO n'est donc pas applicable, en l'espèce, à l'action intentée par la demanderesse contre le défendeur, pour le dommage consécutif à des fautes commises dans le contrôle des factures de l'entrepreneur M. Ces fautes ne
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sont pas à l'origine de défauts de la construction immobilière, elles ont seulement amené la demanderesse à payer à l'entrepreneur en question plus qu'il ne lui était dû. L'action est dès lors soumise à la prescription ordinaire de dix ans, selon l' art. 127 CO .
L'entrepreneur M. a présenté le 21 juin 1965 sa facture au défendeur, qui l'a reconnue exacte le 29 juin et l'a transmise le lendemain 30 juin à la demanderesse en disant qu'elle pouvait la payer. La prescription n'était donc en tout cas pas acquise lorsqu'elle a été interrompue par voie de poursuite le 6 août 1971. Il convient en conséquence d'annuler le jugement déféré et de renvoyer la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle statue quant au fond sur les prétentions de la demanderesse.

Dispositiv

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Admet le recours, annule le jugement rendu le 25 juin 1976 par la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois et renvoie la cause à l'autorité cantonale pour nouveau jugement dans le sens des considérants.

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