Urteilskopf
103 III 112
20. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 17 novembre 1977 dans la cause Claus contre Banque de crédit international, en liquidation concordataire
Regeste
1. Art. 19 Abs. 1 der Verordnung des Bundesgerichts vom 11. April 1935 betreffend das Nachlassverfahren von Banken und Sparkassen: Ausgangspunkt der Frist für die Weiterziehung des Entscheides der Nachlassbehörde an das Bundesgericht.
Art. 79 Abs. 1 OG
: Die Nova, die beim Bundesgericht vorgebracht werden können, weil im kantonalen Verfahren hiezu keine Gelegenheit bestand, müssen innerhalb der Rekurs- bzw. Rekursantwortfrist vorgebracht werden (E. 1).
2. Die Zuständigkeit der Nachlassbehörde ist entsprechend den Befugnissen eines Vollstreckungsorganes beschränkt: Art. 17 Abs. 1 der Bundesgerichtsverordnung vom 11. April 1935 gestattet der genannten Behörde nicht, sich an die Stelle des ordentlichen Richters zu setzen (im vorliegenden Fall: als Sanktion für eine tadelnswerte Geschäftsführung die Rückerstattung der Bezüge der Verwaltungsmitglieder anzuordnen) (E. 2).
A.-
Le 19 mars 1976, la Cour de justice civile du canton de Genève a homologué, en sa qualité d'autorité de concordat, le projet de concordat par abandon d'actif que lui avait soumis la Banque de crédit international. La banque cède notamment à ses créanciers "tout droit résultant de toute action en responsabilité contre tous organes, actionnaires, associés, représentants, employés ou clients et d'une manière générale envers toutes personnes, physiques ou morales, suisses ou étrangères, ayant eu avec elle un rapport juridique quelconque générateur d'obligations", ainsi que "toutes prétentions révocatoires".
Dans les motifs de l'arrêt, la Cour dit estimer "équitable que chacun des administrateurs restitue à la masse la totalité des dividendes, tantièmes et jetons de présence perçus au cours des cinq années qui ont précédé l'octroi du sursis bancaire intervenu le 22 novembre 1974". Certes, ajoute-t-elle, "cette restitution aura une portée dérisoire sur la balance de l'actif et du passif, mais en l'état actuel des choses, dès lors qu'il est notoire que la gestion critiquable de la banque remonte presque à la première année de son existence et s'est perpétuée depuis en dépit des mises en garde émanant du premier organe de contrôle, la fiduciaire Ofor, et de la Commission fédérale des banques, il est justifié d'imposer cette mesure aux administrateurs qui n'auraient pas déjà accompli ce geste spontanément, même si cette mesure ne revêt en définitive qu'un aspect symbolique".
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La mesure ainsi décidée est formulée comme il suit dans le dispositif de l'arrêt:
"Dit que les administrateurs encore en fonction le 23 novembre 1974 devront restituer à la masse dans les trois mois à dater de l'homologation définitive du concordat la totalité des dividendes, tantièmes et jetons de présence perçus au cours des cinq années précédant le 23 novembre 1974 et les y condamne autant que de besoin."
B.-
Karl Claus, domicilié en République fédérale allemande, était l'un des administrateurs visés par la décision reproduite ci-dessus. Mais l'arrêt ne lui a pas été notifié une fois rendu. Quand l'avocat allemand de la Banque de crédit international en liquidation concordataire l'a invité, le 24 mai 1977, à faire un paiement à la banque, se référant à l'obligation imposée aux administrateurs, Claus a répondu, le 3 juin 1977, que l'arrêt de la Cour de justice civile ne lui avait pas été notifié, si bien qu'il n'avait pas force exécutoire en ce qui le concernait. A l'instigation de la banque, la Cour de justice a alors communiqué sa décision à Claus, par voie de commission rogatoire; cette communication a eu lieu le 29 juillet 1977.
C.-
Le 17 août 1977, Karl Claus a recouru au Tribunal fédéral. Faisant valoir que l'arrêt attaqué porte atteinte à ses droits dans la mesure où il impose aux administrateurs l'obligation de restituer à la masse dividendes, tantièmes et jetons de présence, il en demande la réforme "en tant que de besoin".
Dans sa réponse, la Banque de crédit international en liquidation concordataire conclut à ce que le recours soit déclaré irrecevable pour tardiveté, subsidiairement à ce qu'il soit rejeté. Après l'expiration du délai de réponse, elle a encore fait parvenir deux annexes au Tribunal fédéral, expliquant, dans une écriture du 11 octobre 1977, qu'elle n'avait eu connaissance de ces pièces que plus tard.
Extrait des considérants:
2.
Est litigieuse la question de savoir si l'on peut considérer que le recours a été formé en temps utile. Claus a recouru dans les vingt jours dès celui où notification de la décision lui a été faite à l'instigation de l'intimée. Mais, selon cette dernière, le délai de recours ne saurait être calculé dès cette
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communication: il a commencé à courir auparavant, dès le 31 mars 1976, date de la publication, dans la Feuille officielle suisse du commerce, de l'avis de la Cour de justice civile annonçant qu'elle avait homologué le concordat et que l'arrêt pouvait être consulté à son greffe.
Selon l'
art. 19 al. 1 OCB
, le délai de vingt jours pour recourir part de la notification écrite. Cette règle concorde avec les prescriptions sur les recours au Tribunal fédéral contre les décisions d'autorités cantonales de surveillance en matière de poursuite et de faillite, prescriptions qui, en vertu de l'art. 53 al. 2 du règlement d'exécution de la loi sur les banques et les caisses d'épargne, du 30 août 1961 (encore en vigueur actuellement in parte qua, art. 63 al. 2 de l'ordonnance d'exécution de la loi sur les banques et les caisses d'épargne, du 17 mai 1972), sont applicables aux plaintes dirigées contre les décisions de l'autorité de concordat. La communication des décisions des autorités cantonales de surveillance est réglementée à l'
art. 77 OJ
: les décisions sont communiquées avec les motifs au recourant, à l'office intéressé et à la partie adverse. Ainsi, tant selon les règles de l'OCB que selon les prescriptions générales de procédure de l'OJ, celui qui a qualité pour recourir au Tribunal fédéral peut prétendre à la notification écrite de la décision motivée de l'autorité cantonale. La publication officielle n'entre en ligne de compte comme mode de communication tout au plus que lorsque l'adresse du destinataire est inconnue. Tel n'était pas le cas en l'espèce, comme l'atteste le fait que la décision a été notifiée après coup au recourant.
Certains auteurs ont remarqué qu'il pouvait être difficile à l'autorité cantonale de concordat de déterminer le cercle de ceux qui sont lésés dans leurs droits par la décision, au sens de l'
art. 19 al. 1 OCB
, et qui partant ont qualité pour recourir au Tribunal fédéral. Aussi ont-ils suggéré que l'autorité fasse une publication indiquant que la décision est déposée dans un ou des lieux déterminés et qu'elle peut y être consultée (P. ULDRY, Le concordat des instituts bancaires, thèse Fribourg 1937, p. 178; cf. E. GERSBACH, Der Nachlassvertrag ausser Konkurs nach dem schweizerischen Bundesgesetz über die Banken und Sparkassen und seinen Ausführungserlassen, thèse Zurich 1937, p. 94). Il n'y a pas lieu de trancher en l'espèce la question de savoir si une telle publication pourrait,
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dans certaines circonstances données, être de nature à faire courir le délai de recours. Quoi qu'il en soit, la publication officielle ne saurait remplacer la communication écrite de la décision motivée, expressément prévue par la loi, quand, comme en l'occurrence, la décision d'homologation astreint à un paiement. Une prescription de cette espèce exerce une influence telle sur les droits des personnes visées qu'il est très vraisemblable qu'elle fera l'objet d'un recours. L'autorité cantonale devait s'attendre que les administrateurs auxquels elle imposait une obligation de restitution se sentiraient atteints dans leurs droits. Il lui incombait donc de leur communiquer la décision par la voie prescrite par la loi. La publication officielle ne saurait, dans ces conditions, faire courir le délai de recours.
Dans son écriture du 11 octobre 1977, l'intimée fait état d'une pièce dont, dit-elle, elle n'a eu connaissance qu'après l'expiration du délai de réponse: comme les autres administrateurs, le recourant a été informé, par une lettre de l'avocat X., du 1er avril 1976, de la décision de l'autorité cantonale, et notamment de l'obligation de restituer les émoluments d'administrateur. L'intimée a envoyé une copie de cette lettre au Tribunal fédéral. Selon elle, le recours est tardif dès l'instant que Claus était au courant de la décision longtemps avant qu'elle lui eût été notifiée.
D'emblée, se pose la question de savoir si le Tribunal fédéral peut tenir compte de ce fait nouveau. On doit y répondre par la négative. L'
art. 79 al. 1 OJ
(applicable en l'espèce, on l'a vu) prescrit qu'il ne peut pas être présenté de faits et preuves nouveaux lorsqu'ils auraient pu l'être dans la procédure cantonale. Si l'on s'en tient au sens de la disposition, ce droit limité de présenter des nova doit être exercé dans le délai de recours. Après l'expiration du délai, on ne peut plus produire de nova, lors même qu'on ne pouvait en faire état dans la procédure cantonale. Ce principe doit être appliqué par analogie au cas où les nova sont présentés par la partie intimée. Il en découle que doivent être invoqués dans le délai de réponse les faits nouveaux susceptibles d'être présentés devant le Tribunal fédéral faute d'avoir pu l'être dans la procédure cantonale. Tel n'a pas été le cas en l'espèce: on ne peut donc pas entrer en matière sur les allégations formulées par l'intimée dans son écriture du 11 octobre 1977, ni sur les pièces qu'elle y a jointes.
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Le recours devrait d'ailleurs être considéré comme formé en temps utile même si l'on pouvait tenir compte des nova. Une lettre privée, comme celle qui est produite en copie, ne saurait remplacer la communication régulière de la décision par l'autorité qui a statué. On doit en tout cas s'en tenir à ce principe lorsque, comme en l'espèce, la décision elle-même n'a pas été communiquée par écrit avec les motifs, mais qu'il n'y a eu qu'orientation indirecte sur son contenu. Une telle information privée ne saurait, en aucun cas, faire courir le délai de recours.
4.
L'autorité cantonale a motivé sa décision d'ordonner la restitution des émoluments d'administrateur en se fondant sur l'
art. 17 al. 1 OCB
. Aux termes de cette disposition légale, si l'autorité de concordat l'estime nécessaire dans l'intérêt des créanciers et pour sauvegarder leurs droits, elle peut, même sans l'assentiment de la banque débitrice, subordonner l'homologation du concordat à des conditions déterminées, refuser d'homologuer certaines clauses ou encore les modifier. L'intimée cite ULDRY (op.cit. pp. 175/176), selon lequel "le droit bancaire confère... à l'autorité chargée de procéder à l'homologation un pouvoir d'appréciation qui dépasse de beaucoup la notion courante"; le législateur lui a laissé "une libre appréciation complète".
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de poursuite pour dettes et de faillite, c'est une règle fondamentale du droit de l'exécution forcée qu'il n'appartient pas aux autorités de poursuite de trancher des litiges de droit matériel, lesquels relèvent exclusivement de la compétence du juge ordinaire (
ATF 100 III 70
/71 et les références). Il n'y a aucun motif de ne pas s'en tenir à ce principe également dans la procédure de concordat pour les banques et les caisses d'épargne, qui est une forme spéciale de l'exécution forcée. L'étendue de la compétence de l'autorité de concordat doit dés lors, en bonne méthode, être limitée aux pouvoirs d'un organe d'exécution. La décision des questions de droit matériel n'est pas de son ressort. L'autorité de concordat ne serait d'ailleurs pas à même de trancher des différends de droit civil dans la procédure d'homologation de concordat. Cette procédure est très différente d'une procédure contradictoire entre deux parties. Elle n'offre en aucune façon les garanties, inhérentes au procès civil, de réglementation définitive de rapports de droit civil. Il y a donc lieu d'empêcher que l'autorité de
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concordat dise le droit comme un juge civil (cf.
ATF 97 III 130
).
La restitution des émoluments d'administrateur comme sanction d'une gestion critiquable est un point de droit civil. Loin de le nier, l'intimée voit le fondement de cette décision dans l'
art. 754 CO
, ainsi que dans une application analogique des
art. 678 et 679 CO
. Or, on l'a vu, l'
art. 17 al. 1 OCB
ne permet pas à l'autorité de concordat de se substituer au juge ordinaire: la cour cantonale a perdu de vue les limites de sa compétence, en tout cas pour autant que les administrateurs ne se déclaraient pas disposés, dans la procédure de concordat, à restituer spontanément leurs émoluments. Dans ces conditions, l'ordre de restitution doit être annulé en ce qui concerne le recourant, faute de compétence matérielle de l'autorité de concordat. Seul le juge civil peut dire, dans le cadre d'un procès ordinaire ouvert par la masse ou par des créanciers cessionnaires, si Karl Claus doit restituer ses émoluments d'administrateur.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
1. Admet le recours.
2. Annule l'arrêt attaqué dans la mesure où le recourant est condamné à restituer à la masse la totalité des dividendes, tantièmes et jetons de présence qu'il a perçus, en tant qu'administrateur de la Banque de crédit international, au cours des cinq années précédant le 23 novembre 1974.