Urteilskopf
108 II 118
24. Arrêt de la Ire Cour civile du 23 avril 1982 dans la cause masse en faillite d'Avy voyages, Louis Baggiolini, contre Swissair S.A. (recours en réforme)
Regeste
Verkauf von Flugbilleten auf Kredit durch ein Reisebüro.
1. Vertretung des Luftfrachtführers durch das Reisebüro (E. 1).
2.
Art. 401 OR
ist auf die Kaufpreisforderung anwendbar, welche das Reisebüro als indirekter Stellvertreter des Luftfrachtführers erworben hat (E. 2).
3. Lässt sich bei Konkurs des Reisebüros die Masse den Preis des Flugbillets bezahlen, erwirbt der Luftfrachtführer, der sich auf
Art. 401 OR
berufen kann, eine Ersatzforderung, die gemäss
Art. 262 Abs. 1 SchKG
vorab beglichen werden muss (E. 2).
A.-
a) En 1968, la compagnie de transport aérien Swissair S.A. reconnut l'entreprise individuelle de Louis Baggiolini, Avy voyages, comme son agent au sens de la réglementation établie par l'Association internationale de transport aérien (IATA). Par contrat du 1er juillet 1972 passé avec l'IATA, Avy voyages fut ensuite agréée comme agence de vente de billets pour toutes les compagnies membres de l'association. Cette convention autorisait l'agent général qu'était Avy voyages à représenter les transporteurs dans les opérations de vente de billets de passage. L'agent était rétribué par le versement d'une commission. Dès l'émission d'un document de transport, qu'il en ait encaissé ou non le prix, il répondait envers le transporteur du paiement de la somme exigible pour les services couverts par le titre. Il incombait à l'agent de percevoir "le montant afférent au
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transport ou autres services vendus par lui pour le compte du transporteur"; il devait garder ces sommes en dépôt "comme propriété du transporteur ou pour son compte", jusqu'à règlement définitif.
En sa qualité d'agent agréé par l'IATA, Avy voyages conclut avec ses clients de nombreux contrats de transport par avion sur les lignes de la compagnie Swissair S.A. Elle réservait la place et délivrait au client le billet de passage sur formule ad hoc de Swissair. Elle encaissait en son nom le prix du transport, mais pour le compte de Swissair S.A. à qui elle devait le reverser sous déduction de sa commission de 9%. Avy voyages pouvait faire crédit à ses clients, mais en prenait le risque; elle établissait alors une facture à son nom, qu'elle adressait à son client. Elle faisait parvenir à Swissair S.A., chaque semaine, les souches des billets vendus; la compagnie établissait un décompte mensuel et invitait son agent à en régler le solde, après déduction des commissions qui lui étaient dues.
b) Avy voyages a été déclarée en faillite le 4 janvier 1980. A cette date, elle avait vendu pour 220'333 fr. de billets Swissair dont elle n'avait pas encore encaissé le prix. Entre l'ouverture de la faillite et le 19 mai 1980, l'administration de la masse a reçu le paiement d'une partie de ces crédits, par 130'426 fr. Swissair S.A. a revendiqué les créances découlant de l'émission de billets à son nom, impayés au jour de la déclaration de faillite. L'administration de la masse a contesté la revendication.
B.-
La société Swissair S.A. a ouvert action en revendication. Elle a demandé à être reconnue titulaire, sous déduction d'une commission de 9%, de toutes les créances, par 220'333 fr., qu'Avy voyages, Louis Baggiolini, détenait au 4 janvier 1980 contre ses clients pour la vente de billets Swissair. Elle a conclu à la condamnation de la masse en faillite à lui payer, avec intérêt, la somme de 118'688 fr. représentant les 91% des encaissements déjà faits sur ces créances, ainsi que, sous déduction d'une commission de 9%, tous montants perçus après le 19 mai 1980 sur les prétentions en cause.
La Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a admis l'action par jugement du 22 décembre 1981 et condamné la défenderesse aux dépens.
C.-
La masse en faillite défenderesse, Avy voyages, Louis Baggiolini, a déposé un recours en réforme qui tend au rejet de l'action.
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La société demanderesse, Swissair S.A., propose le rejet du recours, avec suite de frais et dépens.
Considérant en droit:
1.
Les parties admettent à juste titre avoir été liées par un contrat d'agence au sens des
art. 418a ss CO
. La défenderesse avait qualité d'agent stipulateur puisqu'elle avait pris à titre permanent l'engagement de conclure des affaires, soit d'émettre et de délivrer des billets au nom et pour le compte de la demanderesse, sans être liée envers elle par un contrat de travail.
L'agence de voyages qui vend, comme agent stipulateur, les billets d'une compagnie d'aviation en est la représentante et crée un lien contractuel direct entre le client et le transporteur aérien (DALLÈVES, Le contrat de voyage, Mémoires de la Faculté de droit de Genève, XIVe journée juridique, 1974, p. 2; WISWALD, Les agences de voyages, thèse Lausanne 1964, p. 47; SCHLEICHER/REYMANN/ABRAHAM, Das Recht der Luftfahrt, 3e éd., p. 274). Le client, partie au contrat de transport dont le billet de passage constitue la preuve, acquiert une créance contre la compagnie, le droit d'exiger d'elle les services définis dans les documents de transport. Il ressort en revanche des conditions du contrat passé avec l'IATA que la défenderesse encaissait le prix des billets en son propre nom, même si elle le faisait pour le compte des compagnies de l'association, pour lesquelles elle devait conserver les montants perçus. Elle pouvait faire crédit à ses clients et, en ce cas, leur adressait une facture établie à son nom. Les règlements de l'IATA ne lui interdisaient même pas, comme agence agréée, de céder à des banques les créances qu'elle possédait contre les acheteurs de billets à crédit, pour obtenir les liquidités dont elle aurait pu estimer avoir besoin. Partant, la défenderesse, en sa qualité d'agence IATA, était titulaire du droit au paiement du prix des billets, des créances dirigées contre les voyageurs et découlant des contrats de transport. Elle agissait toutefois, à cet égard, pour le compte des compagnies affiliées à l'IATA, dont elle était donc la représentante indirecte. Elle le faisait en vertu d'un mandat qui lui avait été confié en conformité des
art. 394 ss CO
, et non pas en exécution de son contrat d'agence proprement dit, car, selon le texte légal, l'agent stipulateur est toujours un représentant direct (
art. 418a al. 1 CO
). La défenderesse était dès lors à la fois représentante directe en vertu du contrat d'agence, puisque, en
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délivrant les billets, elle conférait à ses clients une prétention dirigée contre la demanderesse, soit le droit d'exiger les services couverts par les documents de transport, et représentante indirecte en vertu du contrat de mandat qui l'autorisait à encaisser ou réclamer le prix des billets en son nom mais pour le compte de la demanderesse.
2.
Selon l'
art. 401 CO
, les créances que le mandataire acquiert en son nom mais pour le compte du mandant passent à celui-ci dès qu'il a satisfait à ses propres obligations. Le mandant peut aussi se prévaloir de cette subrogation contre la masse du mandataire tombé en faillite (
art. 401 al. 2 CO
). La disposition précitée s'applique à toutes espèces de mandats, y compris ceux qui sont confiés à un représentant indirect (
ATF 102 II 301
,
ATF 102 II 106
,
ATF 99 II 393
ss).
Il n'a été ni constaté ni même allégué que la demanderesse ait manqué à ses obligations envers la défenderesse, notamment celle de payer la rémunération convenue. Au contraire, elle a déduit de ses prétentions et imputé sur ses conclusions le montant des commissions dues à la défenderesse pour les services rendus dans son activité d'agent. La demanderesse est donc légalement subrogée dans toutes les créances que la défenderesse a acquises par la vente à crédit de billets Swissair. Il n'en irait d'ailleurs pas autrement si, ce faisant, la défenderesse avait opéré non comme mandataire proprement dit mais en qualité d'agent. L'
art. 418b al. 1 CO
renvoie en effet, à titre supplétif, aux dispositions applicables au courtage ou à la commission, lesquelles renvoient à leur tour aux règles du mandat (
art. 412 al. 2,
art. 425 al. 2 CO
).
Seuls les biens qui tombent dans la masse peuvent être affectés au paiement des créanciers du failli (
art. 197 LP
). Les objets appartenant à des tiers doivent leur être remis (
art. 242 LP
). De même, le produit des droits dont le failli n'est pas titulaire, et qui n'entrent pas dans la masse pour un autre motif, ne saurait servir à désintéresser les créanciers. Si, à la suite d'une erreur ou pour toute autre raison, ce produit parvient à l'administration de la faillite, il doit être immédiatement remis au véritable ayant droit. Partant, lorsque la masse encaisse une somme d'argent qui ne lui est pas due à elle mais à un tiers valablement subrogé dans les droits du failli, elle doit faire parvenir le montant reçu à ce tiers cessionnaire, en tout cas si le paiement a eu plein effet libératoire (
ATF 70 III 84
; arrêt non publié du 29 avril 1981 en la cause E. GUNZIGER et Cie, en liquidation concordataire, c. Banque
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populaire suisse). L'ayant droit subrogé qui a été frustré du paiement acquiert contre la masse une créance compensatoire payable selon les modalités de l'
art. 262 al. 1 LP
(BLUMENSTEIN, Handbuch des Schweizerischen Schuldbetreibungsrechtes, p. 674). La Cour cantonale a dès lors justement condamné la masse défenderesse à payer à la demanderesse les montants encaissés indûment sur les créances dans lesquelles cette dernière avait été subrogée.
3.
La défenderesse fait valoir en vain qu'elle s'était engagée envers la demanderesse à lui payer le prix des billets vendus à crédit, et qu'elle avait fourni des garanties à cet effet. Le mandataire qui acquiert des créances en son nom mais pour le compte de son mandant peut fort bien se porter codébiteur solidaire ou garant du principal obligé. De tels engagements ne sont incompatibles ni avec la qualité de représentant indirect, ni avec l'application de l'
art. 401 CO
.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral,
Rejette le recours et confirme le jugement attaqué.