Urteilskopf
111 II 170
36. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 6 août 1985 dans la cause B. contre A. et consorts et C. (recours en réforme)
Regeste
Werkvertrag; Verjährung der Ansprüche des Bestellers gegen den Unternehmer.
Der Anspruch auf Ersatz des Schadens, den der Unternehmer dem Besteller bei Ausführung des Werks, also vor dessen Ablieferung, in Verletzung seiner Sorgfaltspflicht zufügt, unterliegt der ordentlichen zehnjährigen Verjährungsfrist von
Art. 127 OR
.
Les demandeurs sont des entrepreneurs de travaux publics, qui se sont groupés en consortium pour la construction d'un bâtiment scolaire. Un accident s'est produit, le 5 juin 1979, pendant les travaux de montage - confiés au défendeur B. - de la grue louée par les demandeurs à la défenderesse C. La grue s'est en effet déséquilibrée et a chuté sur le chantier, blessant deux personnes et endommageant de nombreuses installations appartenant notamment aux demandeurs.
Ces derniers ont ouvert action, le 14 octobre 1982, contre B. et contre C. en paiement de 123'075 francs 65 plus intérêts.
Par jugement préjudiciel du 7 février 1985, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a prononcé que les droits de nature contractuelle prétendus par les demandeurs contre le défendeur B. n'étaient pas prescrits, mais qu'étaient en revanche prescrits les droits de nature délictuelle contre ce dernier.
B. recourt en réforme au Tribunal fédéral. Il conclut à ce qu'il soit prononcé que les droits de nature contractuelle prétendus par les demandeurs contre lui sont prescrits.
Considérant en droit:
2.
Bien que la question n'ait pas à être nécessairement tranchée, le contrat liant le demandeurs au défendeur apparaît comme un contrat d'entreprise. Le montage de grue promis par le défendeur constitue une obligation de résultat caractéristique de ce contrat et étrangère au contrat de mandat, cela en dépit de l'opinion différente qui ressort de l'arrêt paru aux
ATF 92 II 240
consid. 3a. Le montage doit être considéré comme un véritable ouvrage, au sens de la loi, au même titre que les opérations de transformation, de nettoyage, de réparation, de démolition (cf. GAUCH, Der Werkvertrag, 3e éd., n. 26, 27 et 118; GAUTSCHI, Berner Komm., n. 29 ss ad
art. 365 CO
).
La garantie des défauts de l'ouvrage, au sens des
art. 367 ss CO
, ses conséquences et notamment les délais de prescription qui lui sont liés supposent par définition, selon le texte même de l'
art. 367 al. 1 CO
, que l'ouvrage ait été livré. Dans le cas du montage d'une installation, comme en l'espèce, la livraison est réalisée par
BGE 111 II 170 S. 172
l'achèvement de tous les actes qui devaient être accomplis pour l'édification et le bon fonctionnement de l'installation. Si, après la livraison, des défauts sont constatés ou apparaissent, la responsabilité pour violation de l'obligation générale de diligence de l'entrepreneur, découlant de l'
art. 364 CO
, est absorbée par les dispositions spéciales sur la garantie des défauts (cf. GAUCH, op.cit., n. 596). En revanche, avant la livraison, toute violation de l'obligation de diligence de l'entrepreneur équivalant à une inexécution ou à une mauvaise exécution du contrat est soumise aux dispositions générales sur l'inexécution des contrats, soit aux
art. 97 ss CO
, et non pas aux dispositions sur la garantie des défauts (cf. GAUTSCHI, op.cit., n. 5b, g, h ad art. 364 n. 8 ad
art. 367 CO
; KLAUSER, Die werkvertragliche Mängelhaftung und ihr Verhältnis zu den allgemeinen Nichterfüllungsfolgen, thèse Zurich 1973, p. 16). L'obligation de réparer le dommage résultant d'une telle violation contractuelle est dès lors soumise, faute de disposition spécifique contraire, au délai général de prescription de dix ans de l'
art. 127 CO
. La jurisprudence du Tribunal fédéral - qu'il n'y a pas lieu de remettre en question - a déjà eu l'occasion d'appliquer les
art. 364 et 97 CO
au cas de violation du devoir de diligence dans un contrat de spectacle considéré comme contrat d'entreprise (
ATF 70 II 219
) et au cas de l'acte dommageable causé par un entrepreneur ou ses ouvriers en cours d'exécution du contrat d'entreprise (
ATF 89 II 237
/8 consid. 5). A propos du délai de prescription, elle a précisé de manière tout à fait claire, pour l'action en réparation du dommage causé par l'entrepreneur à son cocontractant lors de l'exécution de l'ouvrage, que l'
art. 371 al. 2 CO
n'était pas applicable et que cette action était soumise à la prescription ordinaire de dix ans de l'
art. 127 CO
(
ATF 102 II 418
/9 consid. 3).
C'est donc à juste titre que la cour cantonale a jugé en l'espèce que l'action fondée sur l'exécution défectueuse des obligations contractuelles du défendeur n'était pas prescrite. Le recourant invoque à tort la jurisprudence et les principes applicables en matière de vente, car ceux-ci s'appliquent uniquement à des situations où la livraison de la chose vendue ou de l'ouvrage a eu lieu et où les dispositions régissant la garantie des défauts l'emportent sur les dispositions générales sur l'inexécution des obligations.
On ne parviendrait enfin pas à une autre solution si l'on voulait qualifier le contrat conclu entre parties de mandat (
art. 127 et 394 ss CO
).
Le recours doit ainsi être rejeté.