BGE 116 II 713 vom 18. Dezember 1990

Datum: 18. Dezember 1990

Artikelreferenzen:  Art. 828 CO, Art. 888 CO , art. 828 ss CO, art. 888 al. 2 CO, art. 748 CO, art. 1er let, art. 63 al. 2 OJ

BGE referenzen:  129 III 641, 133 III 368 , 115 II 58, 97 I 487

Quelle: bger.ch

Urteilskopf

116 II 713


124. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 18 décembre 1990 dans la cause J. et S. contre Caisse-maladie de X. (recours en réforme)

Regeste

Genossenschaft; Klage auf Aufhebung eines Fusionsbeschlusses.
Juristische oder praktische Probleme, welche die Wiederherstellung des früheren Zustandes hervorrufen kann, stellen in der Regel keinen hinreichenden Grund dar, eine Klage auf Aufhebung oder auf Feststellung der Nichtigkeit eines Fusionsbeschlusses, den die Generalversammlung einer Genossenschaft in Verletzung gesetzlicher oder statutarischer Bestimmungen gefasst hat, als gegenstandslos zu erklären (E. 4).

Sachverhalt ab Seite 713

BGE 116 II 713 S. 713

A.- La Caisse-maladie de X. (ci-après: la Caisse) est une société coopérative, au sens des art. 828 ss CO . Elle a son siège à X., n'est pas inscrite au registre du commerce et est soumise à la loi fédérale du 13 juin 1911 sur l'assurance-maladie (LAMA). Selon les art. 67 al. 1 et 66 ch. 8 de ses statuts, l'assemblée générale prend les décisions relatives à la fusion de la société à la majorité des deux tiers des voix émises. L'art. 5 des statuts dispose que toutes les publications de nature générale qui obligent les assurés se font par affichage aux panneaux communaux. Cependant, à une date indéterminée, le comité de la Caisse aurait introduit un nouveau système de convocation sous forme de lettres personnelles adressées aux "chefs de famille" et à chaque particulier vivant seul. C'est ainsi que, pour un enfant majeur faisant ménage commun avec son père, la convocation n'était envoyée, en principe, qu'à ce dernier. De ce fait, il arrivait que des enfants majeurs, qui avaient quitté le foyer paternel à l'insu de la Caisse, ne fussent pas atteints par les communications de celle-ci.
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En 1986, la Caisse comptait quelque 900 associés, dont une majorité d'adultes, et ses réserves en capital dépassaient le million de francs.

B.- Par lettre du 4 novembre 1986, adressée aux chefs de famille, le comité de la Caisse a convoqué une assemblée générale extraordinaire, appelée à se prononcer sur la fusion avec une caisse-maladie plus importante. Lors de cette assemblée, qui a eu lieu le 17 novembre 1986, le principe de la fusion a été accepté à la quasi-unanimité des votants. Invités ensuite à choisir le partenaire de fusion parmi les quatre caisses-maladie ayant fait une offre, les associés présents ont désigné la Caisse Y. par 107 voix sur 174. La majorité des deux tiers des voix émises n'étant pas atteinte, ils ont chargé le comité de se renseigner sur la validité de cette votation. Le 5 décembre 1986, les assurés ont reçu une lettre du comité entérinant les décisions prises par l'assemblée générale extraordinaire.
Le contrat de fusion, qui prévoyait, entre autres stipulations, le libre passage d'une caisse à l'autre, dès le 1er janvier 1987, et le transfert de la fortune de la Caisse à la Caisse Y., a été signé le 22 décembre 1986. Il n'a pas été soumis à l'assemblée générale de la Caisse et a été approuvé le 26 août 1987 par l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS).

C.- J. et son fils majeur S., tous deux membres de la Caisse, ont introduit, séparément, une action en annulation de la décision de fusion, le premier en date du 17 décembre 1986, le second quelques jours plus tard. Ils alléguaient, en substance, que l'assemblée générale extraordinaire n'avait pas été convoquée régulièrement et qu'elle n'avait, de surcroît, pas pris la décision de fusion à la majorité prescrite. Les deux causes ont été jointes. La défenderesse a conclu au déboutement des demandeurs.
Le 31 décembre 1986, S. a requis, à titre de mesure provisionnelle, la suspension des effets de la décision de fusion. Sa requête a été rejetée le 23 janvier 1987 et il n'a pas formé un recours de droit public au Tribunal fédéral.
Par jugement du 8 mai 1990, la Cour civile I du Tribunal cantonal du canton du Valais a constaté que les actions des demandeurs étaient devenues sans objet. Elle a considéré, en substance, que, s'il y avait effectivement matière à annulation des décisions prises lors de l'assemblée générale extraordinaire du 17 novembre 1986, faute d'une convocation régulière des associés, voire à la constatation de la nullité de la décision de fusion, qui
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n'avait pas été prise à la majorité requise, l'impossibilité de rétablir la situation antérieure à la fusion faisait néanmoins obstacle à l'admission des conclusions des demandeurs.

D.- Agissant par la voie du recours en réforme, les demandeurs invitent le Tribunal fédéral à déclarer nulles, respectivement à annuler, les décisions litigieuses.
La défenderesse conclut au rejet du recours.

Erwägungen

Extrait des considérants:

3. Les premiers juges ont conclu à l'annulabilité des décisions prises lors de l'assemblée générale extraordinaire du 17 novembre 1986, au motif que celle-ci n'avait pas été convoquée conformément aux règles statutaires. La défenderesse ne critique pas les considérations juridiques qu'ils ont émises à ce propos. Sans doute le Tribunal fédéral est-il tenu d'appliquer d'office le droit fédéral, sans être lié par l'argumentation des parties ( ATF 115 II 58 et les arrêts cités). En l'occurrence, la violation des statuts est toutefois à ce point manifeste qu'il n'y a pas lieu de s'y attarder. Il est, en effet, patent qu'une convocation faite par l'envoi de lettres aux chefs de famille ne pouvait remplacer le seul mode établi par les statuts, à savoir l'affichage aux panneaux communaux.
Le défaut de convocation valable entraînant déjà à lui seul l'annulation des décisions de l'assemblée générale, on peut se dispenser de rechercher si ces décisions ont été prises en conformité avec les statuts et, dans la négative, si elles sont absolument nulles ou seulement annulables. Peut notamment rester indécise la question de savoir si la majorité qualifiée, prescrite pour la fusion de la société coopérative ( art. 888 al. 2 CO ), est requise non seulement pour la décision de principe, mais aussi pour les autres décisions relatives à la fusion et, singulièrement, pour celle qui a trait au choix de la société reprenante.

4. a) Se ralliant à l'avis de CUENDET (La fusion par absorption, en particulier le contrat de fusion, dans le droit suisse de la société anonyme, thèse Lausanne 1973, p. 130 in fine), la cour cantonale estime que l'action tendant à constater la nullité de la fusion est toujours possible, théoriquement, mais qu'elle peut placer les parties dans une situation inextricable. En effet, si les patrimoines ont été mélangés et qu'il y ait déjà eu des opérations les affectant, il ne sera pratiquement plus possible de "défaire" la fusion. En pareille hypothèse, il faudra admettre que l'inscription
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guérit même les vices qui entraînent la nullité absolue. Or, si l'on en croit les juges précédents, le rétablissement de la situation dans laquelle se trouvaient la défenderesse et ses membres en novembre 1986 ne serait plus envisageable: d'abord, du fait de la disparition d'une grande partie de la réserve qu'elle s'était constituée, la défenderesse n'aurait plus les possibilités de choix qui existaient avant le 1er janvier 1987; ensuite, l'approbation du contrat de fusion par l'OFAS et l'absence de recours de droit public contre la décision de rejet des mesures provisionnelles auraient créé un état de choses irréversible; enfin, sur le plan comptable, la division des patrimoines confondus serait vraisemblablement irréalisable. Aussi la cour cantonale arrive-t-elle à la conclusion que, dans ces conditions, les actions des demandeurs n'ont plus d'objet.
Dans leur recours en réforme, les demandeurs s'emploient, au contraire, à démontrer que le retour au statu quo ante est possible sans grandes difficultés juridiques ou pratiques.
b) Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à la société anonyme, l'inscription de la dissolution de la société absorbée peut être rapportée en cas d'annulation subséquente de la décision de fusion, même s'il en résulte des difficultés pratiques considérables ( ATF 97 I 487 consid. 3b, II 189 consid. I/2). En d'autres termes, l'effet guérisseur de l'inscription au registre du commerce n'est pas absolu et l'idée qu'une fusion réalisée ne puisse plus être remise en cause ne saurait être admise. Il importe, au contraire, de privilégier le droit fondamental de tout actionnaire ou associé d'attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts. Certes, comme le relève avec pertinence RECORDON (La protection des actionnaires lors des fusions et scissions de sociétés en droit suisse et en droit français, thèse Genève 1974, p. 284), les faits économiques refusent parfois de se plier au pouvoir divin du juge de faire que ce qui fut n'ait pas été. Il reste que le juge doit rechercher par tous les moyens à rétablir une situation conforme au droit, sans s'arrêter aux difficultés pratiques qui pourraient résulter de sa décision. Cela étant, il se trouvera des cas dans lesquels la remise des choses en l'état se heurterait à des difficultés insurmontables, au point de ne plus apparaître comme souhaitable. Il n'est ainsi pas possible de poser, en ce domaine, des règles absolues, qui s'appliqueraient en toute hypothèse. Dès lors, la solution du problème passe par la pesée des intérêts en présence (BÜRGI/NORDMANN, n. 84 et 86 in fine ad art. 748 CO ; RECORDON, A propos des arrêts FUSAG contre
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Ursina-Franck S.A.: L'annulation de la décision de la société absorbée après l'inscription de la fusion au registre du commerce, in: Société anonyme suisse, 45/1973, p. 119 ss).
c) L'examen des circonstances de la cause en litige, à la lumière de ces principes, révèle une violation du droit fédéral par les premiers juges, qui ont constaté sans raison valable que les actions des demandeurs étaient devenues sans objet.
aa) Il a échappé à la cour cantonale que l'on n'a pas affaire ici à une société commerciale inscrite au registre du commerce, mais à une caisse-maladie reconnue, qui a acquis la personnalité juridique sans être inscrite audit registre ( art. 1er let . c de l'Ordonnance V sur l'assurance-maladie concernant la reconnaissance des caisses-maladie et des fédérations de réassurance, ainsi que leur sécurité financière, du 2 février 1965; RS 832.121). Par conséquent, les développements de la doctrine touchant l'inscription et ses effets à l'égard des tiers ne sont pas déterminants en l'espèce.
bb) Force est de constater, ensuite, que le comité de la défenderesse a signé le contrat de fusion à une date postérieure à la notification de l'exploit l'informant de l'ouverture de la première des deux actions en annulation de la décision de fusion. Ledit comité a donc pris le risque de conclure le contrat de fusion en sachant que la décision qui l'habilitait à le faire était attaquée en justice. De surcroît, il ne semble pas avoir signalé la chose à l'OFAS, car on peut admettre que celui-ci n'eût pas approuvé le contrat de fusion sans autre formalité s'il avait eu vent de la procédure en annulation de la décision de fusion.
cc) Les juges cantonaux méconnaissent, en outre, les effets de l'approbation donnée par l'OFAS lorsqu'ils écrivent qu'elle a, en quelque sorte, purgé les vices affectant la fusion: une telle approbation (sur sa portée, cf. MAURER, Schweizerisches Sozialversicherungsrecht, vol. II, p. 283 ss) n'avait aucune incidence sur la validité formelle des décisions prises lors de l'assemblée générale du 17 novembre 1986, cette question étant régie exclusivement par les dispositions topiques du code des obligations et des statuts de la défenderesse.
De plus, la cour cantonale attribue à tort le même effet guérisseur à l'absence de recours de droit public contre la décision de rejet des mesures provisionnelles requises par S. Si l'on tient compte des limites du pouvoir d'examen du Tribunal fédéral en la matière, on ne saurait reprocher au requérant de n'avoir pas formé
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un recours de droit public contre cette décision, laquelle précisait d'ailleurs qu'elle ne préjugeait en rien le sort de l'action au fond. Et il est vrai que l'intéressé aurait sans doute eu quelque peine à démontrer que le juge des mesures provisionnelles avait exclu arbitrairement le risque qu'il subisse un dommage sérieux en acceptant son affiliation à une caisse-maladie plus importante que ne l'était la défenderesse.
dd) Il n'est, enfin, pas possible de suivre l'autorité cantonale lorsqu'elle affirme que la fusion est irréversible du point de vue comptable. En effet, les premiers juges constatent, par ailleurs, que la Caisse Y. a tenu un état séparé des associés de la société absorbée, des conditions financières résultant pour eux des primes plus basses encaissées, des prestations faites aux assurés, ainsi que des prélèvements opérés sur l'important actif net transféré à la Caisse Y. au début de l'année 1987. De ces constatations, que la défenderesse tente en vain de remettre en cause ( art. 63 al. 2 OJ ), il ressort que les patrimoines des deux caisses ont été gérés séparément; leur division ne doit donc pas être irréalisable, ni entraîner des frais excessifs, contrairement à l'opinion de la cour cantonale sur ce point.
d) Au terme de cet examen, il apparaît que, si les juges précédents ont admis à juste titre le bien-fondé des arguments des demandeurs, ils ont, en revanche, violé le droit fédéral en déboutant ceux-ci motif pris de ce que leurs actions étaient devenues sans objet. Il convient donc d'admettre le recours et d'annuler le jugement attaqué ainsi que les décisions litigieuses.

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