Urteilskopf
118 V 158
20. Arrêt du 1er septembre 1992 dans la cause X contre Caisse de pensions du personnel de la commune de C. et Tribunal administratif du canton de Neuchâtel
Regeste
Art. 2 Abs. 1 und Abs. 2,
Art. 10 Abs. 1 und
Art. 23 BVG
,
Art. 1 Abs. 1 lit. d BVV 2
,
Art. 9 VVG
: Mitgliedschaft von Invaliden bei einer Vorsorgeeinrichtung.
-
Art. 1 Abs. 1 lit. d BVV 2
, wonach Personen, die im Sinne der Invalidenversicherung zu mindestens zwei Dritteln invalid sind, von der obligatorischen Versicherung ausgenommen sind, ist nicht gesetzeswidrig (Erw. 4b-Erw. 4d).
- Wann kann bei einer bereits invaliden Person eine Verbesserung der Erwerbsfähigkeit angenommen werden, welche die Unterstellung unter die obligatorische Versicherung gestattet? (Erw. 4e).
- Analogieweise Anwendung von
Art. 9 VVG
im Bereich der weitergehenden Vorsorge, wenn der Versicherte beim Eintritt in die Vorsorgeeinrichtung bereits vollständig invalid ist (Erw. 5).
A.-
X, né le 17 juin 1964, ressortissant espagnol, souffre depuis l'adolescence d'une affection psychique diagnostiquée en décembre 1983 et en juin 1984 comme une schizophrénie hébéphréno-catatonique.
En 1981 et en 1982, alors qu'il était domicilié à N., il a commis diverses infractions, pour lesquelles l'Autorité tutélaire du district de N. l'a condamné, par jugement du 9 août 1982, à une peine de quatre mois de détention avec sursis.
Selon le droit de son pays d'origine, X est devenu majeur à l'âge de 18 ans révolus. Le 24 janvier 1984, pendant qu'il séjournait dans un hôpital psychiatrique, en raison de troubles du comportement, l'autorité tutélaire a prononcé son interdiction provisoire.
Par la suite, après l'échec de diverses tentatives de placement, X a commis de nouvelles infractions, dont un brigandage et de nombreux vols. Il a été arrêté le 21 novembre 1984 et maintenu en détention préventive. Puis il a été renvoyé devant le Tribunal correctionnel du district de N., lequel, en considération de son jeune âge et de sa responsabilité diminuée, a prononcé son placement dans une maison d'éducation au travail (jugement du 22 mai 1985).
Dès le 10 novembre 1986, l'intéressé a bénéficié du régime de semi-liberté.
Le 23 novembre 1984, X s'était vu allouer une rente entière de l'assurance-invalidité, après que la Commission de l'assurance-invalidité lui eut reconnu une incapacité de gain de 100 pour cent à partir du 1er juillet 1982. Ayant appris plus tard que l'assuré était entré en détention, la Caisse cantonale de compensation a, par la voie de la révision, supprimé la rente "à fin janvier 1985". Cette mesure a donné lieu à une procédure qui a fait l'objet, en dernière instance, d'un arrêt du Tribunal fédéral des assurances.
B.-
Après sa libération et avec l'appui de la Société cantonale de patronage, X a été engagé, dès le 1er mai 1987, en qualité d'ouvrier de voirie par la direction des travaux publics de la commune de C. Son salaire mensuel brut était de 2'908 fr. 35. La lettre d'engagement précisait que, conformément aux dispositions légales en matière de prévoyance professionnelle, l'employé serait affilié, à partir du
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1er mai 1987 également, à la Caisse de retraite en faveur du personnel communal de la commune de C. (CPC).
Jusqu'à cette époque, X, qui n'avait pu, en raison de son état de santé, accomplir un apprentissage, n'avait jamais exercé d'activité professionnelle régulière. Il avait travaillé pendant deux mois en 1982, en qualité d'aide-vendeur, et pendant un mois en 1986, dans un atelier d'ébénisterie.
Lors d'un entretien téléphonique du 22 avril 1987, le tuteur de X a informé le secrétariat de la commission de l'assurance-invalidité de l'engagement susmentionné, tout en insistant sur le caractère aléatoire de cette "tentative de reprise de travail", eu égard à la nature de l'affection psychique de l'assuré et au caractère versatile de ce dernier.
C.-
A partir de l'automne 1987, le comportement au travail de X s'est notablement dégradé. En raison d'une crise clastique survenue le 27 novembre 1987 - probablement à la suite d'un abus d'alcool et de drogue - l'intéressé a été à nouveau hospitalisé, durant quelques jours, dans un hôpital psychiatrique. Le 10 janvier 1988, une deuxième crise a nécessité l'intervention d'un médecin du Centre psycho-social de C. Le 3 mars 1988, le patient a été une nouvelle fois admis dans un établissement psychiatrique.
Par lettre du 8 mars 1988, la direction des travaux publics de la commune de C., se prévalant de justes motifs, a résilié les rapports de service de l'employé pour le 30 avril suivant. A l'appui de sa décision, elle invoquait une inaptitude professionnelle, ainsi que de nombreuses absences injustifiées.
D.-
Peu après son licenciement, X s'est rendu en Espagne, où il vit actuellement auprès de ses parents.
Le 20 octobre 1988, le tuteur a demandé à la CPC d'allouer à son pupille une pension d'invalidité. La CPC a refusé, tout d'abord par lettre du 28 octobre 1988, puis, à la suite d'une nouvelle intervention du tuteur, par une "décision" du 30 novembre 1990. Ce refus était motivé par le fait que l'incapacité de travail et de gain alléguée était antérieure à l'engagement et que, au surplus, l'intéressé, entièrement invalide, avait été affilié à tort à la CPC. Conformément à l'indication des voies de droit figurant au bas de ladite décision, X a porté le différend devant le Conseil communal de la commune de C., qui a rejeté son "recours" le 17 avril 1991.
Dans l'intervalle, le 23 avril 1990, le Tribunal de première instance de son domicile en Espagne, considérant que X souffrait de schizophrénie paranoïaque et qu'il était, de ce fait, privé de la
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possibilité de s'occuper de sa personne et de gérer ses affaires, l'a placé sous l'autorité parentale de son père et de sa mère. Aussi bien, l'Autorité tutélaire du district de N. a-t-elle relevé le tuteur de ses fonctions par décision du 22 février 1991.
E.-
X, agissant par ses parents, eux-mêmes représentés par le tuteur, a recouru devant le Tribunal administratif du canton de Neuchâtel contre la décision susmentionnée du Conseil communal de la commune de C.
Le tribunal administratif a considéré son mémoire comme une demande introductive d'action, demande qu'il a rejetée par jugement du 7 octobre 1991. En bref, il a retenu que l'incapacité de travail du demandeur était survenue avant son engagement au service de la commune de C. et que cette incapacité avait subsisté pendant les rapports de travail, bien que l'employé eût été momentanément en mesure d'accomplir les tâches, au demeurant modestes, qui lui avaient été assignées par l'employeur. En conséquence, il fallait admettre que la survenance de l'éventualité assurée était antérieure à l'affiliation à la CPC, de sorte que celle-ci était libérée de son obligation de verser des prestations d'invalidité.
F.-
Toujours représenté par ses parents, au nom desquels agit le même mandataire, X interjette un recours de droit administratif contre ce jugement en concluant au paiement par la CPC d'une pension d'invalidité dès le 1er mars 1988.
La CPC conclut au rejet du recours.
Pour l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS), l'issue de la procédure dépend du point de savoir si le recourant était ou non invalide au moment de son engagement. L'office s'abstient de prendre position à ce sujet, tout en relevant qu'une réponse négative à la question ainsi posée doit, à son avis, conduire à l'admission du recours.
G.-
A la suite de l'arrêt du Tribunal fédéral des assurances sur la question de la rente de l'assurance-invalidité, la caisse de compensation, par décision du 11 mars 1988, a alloué à l'assuré une rente entière pour la période du 1er février 1985 au 30 juin 1987; elle a précisé que le droit à la rente était suspendu du 1er mars 1985 au 31 octobre 1986, en raison de la détention de l'assuré et conformément aux considérants de cet arrêt.
Par une décision ultérieure, du 26 mai 1988, elle a rétabli le droit de l'assuré à une rente entière, à partir du 1er mars 1988 (fin des rapports de service de l'intéressé).
BGE 118 V 158 S. 162
Considérant en droit:
1.
Selon les anciens statuts de la CPC (version en vigueur jusqu'au 31 décembre 1990), les décisions de celle-ci pouvaient faire l'objet, dans les trente jours, d'un recours devant le Conseil communal de la commune de C.
A ce propos, les premiers juges rappellent à juste titre que, selon les règles de la LPP, les institutions de prévoyance - de droit public ou de droit privé - n'ont pas le pouvoir de rendre des décisions proprement dites (
ATF 115 V 224
). En effet, la procédure prévue par l'
art. 73 LPP
n'est pas déclenchée par une décision au sens juridique du terme, mais par une simple prise de position de l'institution de prévoyance, qui ne peut s'imposer qu'en vertu de la décision d'un tribunal saisi par la voie de l'action (
ATF 115 V 239
).
En ce qui concerne, par ailleurs, la saisie d'une autorité intermédiaire, pour les contestations en matière de prévoyance professionnelle, les cantons sont libres de prévoir un échelonnement de la procédure en deux instances, à la condition qu'il s'agisse d'autorités judiciaires. Dans ce cas, l'autorité inférieure peut être saisie par la voie de l'action et rendre une décision sujette à recours devant une autorité de seconde instance - en règle ordinaire la dernière juridiction cantonale - dans les délais prévus par le droit cantonal. A l'inverse, lorsque l'autorité intermédiaire est administrative, elle ne saurait être saisie par la voie de l'action et elle n'est pas habilitée à rendre des décisions, susceptibles de passer en force de chose jugée si elles ne sont pas attaquées dans les délais: cela pour la même raison que celle exposée ci-dessus, savoir que les déclarations des institutions de prévoyance ne peuvent s'imposer qu'en vertu de la décision d'un tribunal statuant sur action (sur ces divers points, voir
ATF 117 V 341
consid. 2).
En l'occurrence, la procédure suivie a donc été entachée d'une double irrégularité, dès lors que la CPC a rendu une décision sujette à recours devant un conseil communal. Cette irrégularité n'a toutefois pas eu de conséquence sur le plan pratique, puisque le tribunal administratif - qui est l'autorité compétente pour statuer sur des contestations opposant institutions de prévoyance et ayants droit au sens de l'
art. 73 al. 1 LPP
- a admis, avec raison, de convertir le recours porté devant lui en une demande introductive d'action (cf.
ATF 115 V 231
in initio).
2.
La CPC est une institution de droit public créée par la commune de C. par arrêté du Conseil général du 5 mai 1952 (art. 1er du règlement de la CPC).
BGE 118 V 158 S. 163
Les institutions de prévoyance de droit public étant, sous l'angle de la procédure, mises sur un même pied que les institutions de droit privé, le Tribunal fédéral des assurances, statuant en vertu de l'
art. 73 al. 4 LPP
, examine librement l'application du droit cantonal ou communal de la prévoyance professionnelle, qu'il s'agisse ou non de prestations d'assurance au sens de l'
art. 132 OJ
(
ATF 116 V 334
consid. 2b).
3.
La CPC, d'autre part, est une institution de prévoyance qui participe à l'application du régime de l'assurance obligatoire introduit par la LPP.
Selon l'art. 15 de son règlement, dans sa version du 31 janvier 1980, en vigueur jusqu'au 31 décembre 1990 (et applicable à l'époque de l'engagement du recourant), le salaire assuré est fixé par le comité avec l'assentiment du Conseil communal. Le salaire mensuel du recourant était de 2'908 fr. 35. Les parties n'ont cependant fourni aucune indication sur le salaire assuré. Mais il ressort d'une feuille de paie figurant au dossier que la cotisation personnelle du recourant à l'institution de prévoyance s'élevait à 119 fr. 50 par mois, selon un taux de 6 pour cent.
On peut donc en déduire que le salaire mensuel assuré était de 1'991 fr. 60, selon la formule:
119 fr. 50 = (salaire assuré x 6)/100
Il apparaît ainsi que la déduction de coordination, par 916 fr. 75 (2'908 fr. 35 - 1'991 fr. 60 = 916 fr. 75) était plus basse que la limite inférieure légale de coordination (
art. 8 al. 1 LPP
en corrélation avec l'
art. 5 OPP 2
). En effet, en 1987, cette limite était de 17'280 francs par an ou 1'440 francs par mois (ch. I de l'O 86 sur l'adaptation des montants-limites de la prévoyance professionnelle - RO 1985 1345; actuellement, la limite est de 21'600 francs, conformément au ch. I de l'O 92 sur le même objet - RO 1991 2382).
C'est dire que la CPC assurait en l'occurrence une part du salaire qui se situait en deçà du minimum obligatoire. Cette part relève de la prévoyance dite "sous-obligatoire", qui ressortit elle-même à la prévoyance plus étendue (
art. 49 al. 2 LPP
;
ATF 114 V 37
in initio; RIEMER, Das Recht der beruflichen Vorsorge in der Schweiz, § 1, note 19; RIEMER, Vorsorge-, Fürsorge- und Sparverträge der beruflichen Vorsorge, in: Innominatverträge, Festgabe zum 60. Geburtstag von Walter R. Schluep, Zurich 1988, p. 234).
BGE 118 V 158 S. 164
En conséquence, il est nécessaire de procéder à un double examen, en fonction des règles applicables à chacun des deux régimes de la prévoyance professionnelle.
4.
Il convient ainsi, tout d'abord, d'examiner le cas sous l'angle des dispositions qui régissent la prévoyance obligatoire.
a) Selon l'
art. 2 al. 1 LPP
(en corrélation avec la disposition précitée de l'O 92), sont soumis à l'assurance obligatoire les salariés qui ont plus de 17 ans et reçoivent d'un même employeur un salaire annuel supérieur à 21'600 francs. L'assurance obligatoire commence en même temps que les rapports de travail (
art. 10 al. 1 LPP
).
L'
art. 1er al. 1 let
. d OPP 2 prévoit cependant que les personnes invalides au sens de l'AI à raison des deux tiers au moins ne sont pas soumises à l'assurance obligatoire. Elles ne peuvent pas non plus, contrairement à d'autres salariés exemptés de l'assurance (art. 1er al. 1 let. a, b, c et e OPP 2), être affiliées à titre facultatif selon la LPP (
art. 1er al. 3 et 4 OPP 2
a contrario). Cette exclusion a été décidée par le Conseil fédéral sur la base de l'
art. 2 al. 2 LPP
, selon lequel l'autorité exécutive "définit les catégories de salariés qui, pour des motifs particuliers, ne sont pas soumis à l'assurance obligatoire".
b) Entre autres arguments, la caisse a invoqué la "nullité" de l'affiliation du recourant, en se fondant, justement, sur la disposition réglementaire précitée. Selon elle, l'invalidité (supérieure aux deux tiers) de l'assuré excluait toute couverture et, partant, tout droit aux prestations. Pour leur part, les premiers juges ont soulevé, sans la résoudre, la question de la légalité de l'
art. 1er al. 1 let
. d OPP 2. Ils ont estimé que le refus de l'intimée se justifiait du seul fait déjà que l'incapacité de travail et de gain était survenue avant l'engagement de l'intéressé. Or, selon une règle générale en matière d'assurances, il n'est pas possible d'assurer un risque qui s'est déjà réalisé.
L'on ne peut toutefois se dispenser d'examiner la question de la validité de l'affiliation du recourant à la CPC. En effet, s'il apparaît que ce dernier a été affilié à tort à l'institution de prévoyance, sa prétention devra d'emblée être rejetée et le problème de la restitution des cotisations perçues se posera inévitablement. Dans le cas contraire, ou bien l'assuré se verra reconnaître le droit à une pension d'invalidité, ou bien il aura droit à une prestation de libre passage, qui devra en principe lui être payée en espèces (
art. 30 al. 2 let. a LPP
).
c) Les motifs qui sont à la base de l'
art. 1er al. 1 let
. d OPP 2 ont été exposés par l'OFAS dans son commentaire du projet d'OPP 2, du mois d'août 1983. Certaines personnes invalides à raison des deux
BGE 118 V 158 S. 165
tiers au moins ont encore la possibilité, par la mise en valeur de leur capacité résiduelle de gain, de réaliser un salaire supérieur à la limite de coordination de 21'600 francs (il était à l'époque prévu que la limite serait de 16'560 francs). De telles personnes, déjà au bénéfice d'une rente entière de l'assurance-invalidité (
art. 28 al. 1 LAI
), pourraient ainsi prétendre une rente entière de l'institution de prévoyance (
art. 24 LPP
). Il s'est donc agi d'éviter qu'une institution de prévoyance ne doive fournir des prestations pour un cas d'assurance survenu antérieurement à l'affiliation. Il eût été contraire, en effet, à un principe fondamental en matière d'assurances de couvrir un risque déjà réalisé.
La clause de délégation de l'
art. 2 al. 2 LPP
confère un très large pouvoir d'appréciation au Conseil fédéral pour déterminer quelles catégories d'assurés doivent être exclues de l'assurance obligatoire. En outre, le principe fondamental susmentionné n'est aucunement étranger à l'esprit et au but d'une assurance obligatoire (cf. par analogie l'
art. 6 al. 1 LAI
). On ne saurait, par conséquent, taxer d'illégale la solution adoptée par le Conseil fédéral (à propos du contrôle judiciaire de la légalité des ordonnances du Conseil fédéral, voir p.ex.
ATF 116 V 58
consid. 3b et 193 consid. 3,
ATF 116 Ib 413
consid. 3b,
ATF 114 Ib 19
consid. 2). Cette solution n'est du reste pas critiquée en doctrine. Certains auteurs en prennent acte sans la commenter (RIEMER, Das Recht der beruflichen Vorsorge in der Schweiz, § 1, note 20; GERHARDS, Grundriss Zweite Säule, p. 61, note 13; HELBLING, Les institutions de prévoyance et la LPP, trad. MAGDELAINE, p. 82; ELROD, Der Arbeitnehmerbegriff des BVG im Rahmen der schweizerischen Rechtsordnung, thèse Zurich, 1989, p. 43); d'autres se réfèrent, sans autres développements, aux explications de l'OFAS (BRÜHWILER, Die betriebliche Personalvorsorge in der Schweiz, p. 276, note 27; UMBRICHT/LAUR, La nouvelle loi sur les caisses de pensions, chap. 4/2.2, p. 6).
d) Citant l'avis de HÄBERLE (Berufliche Vorsorge von Behinderten, SZS 1985 p. 146), la juridiction cantonale objecte, il est vrai, que l'exclusion durable du deuxième pilier de personnes invalides qui parviennent malgré tout à réaliser un faible revenu n'est guère satisfaisante sur le plan social: le préjudice économique que subissent ces invalides au moment de prendre leur retraite ou en cas de perte de leur capacité résiduelle de gain n'est pas compensé par des prestations d'assurance; paradoxalement, une grande majorité d'assurés - valides - bénéficient d'une protection qui suffit très largement à la couverture de leurs besoins et qui va même au-delà. Mais cette
BGE 118 V 158 S. 166
critique s'adresse en réalité au système légal qui exige que le salaire atteigne un certain montant pour être assuré. Il est peu fréquent, pour ne pas dire très rare, qu'une personne invalide à raison des deux tiers au moins soit encore en mesure de réaliser un salaire supérieur à 21'600 francs. Dans la majorité des cas, l'exclusion critiquée résulte ainsi des dispositions de la loi et non de celles de l'ordonnance.
En pratique, l'
art. 1er al. 1 let
. d OPP 2 sera donc surtout applicable aux personnes invalides qui tentent de reprendre une activité professionnelle et qui continuent à bénéficier d'une rente (entière) de l'assurance-invalidité, soit parce que l'employeur verse un salaire social - qui ne fait pas partie du revenu déterminant pour l'évaluation de l'invalidité; voir par ex.
ATF 117 V 18
-, soit parce que l'amélioration ne se maintient pas durant une assez longue période (
art. 88a al. 1 RAI
).
e) A l'inverse, l'
art. 1er al. 1 let
. d OPP 2 ne permet pas d'exclure de l'assurance obligatoire des personnes qui ont été frappées d'une invalidité des deux tiers au moins et qui, ultérieurement, ont recouvré - et mis à profit - leur capacité de gain (cf.
art. 14 al. 4 OPP 2
). Il en est de même des invalides de naissance ou précoces qui parviennent, par suite de disparition ou de diminution de l'invalidité, à s'insérer dans la vie professionnelle (voir à ce sujet Handicapés et deuxième pilier, Etude de l'OFAS, RCC 1984 p. 542 ss, plus spécialement p. 545 s.). On rappellera à cet égard que, dans l'assurance obligatoire des salariés en vertu de la LPP, les institutions de prévoyance n'ont pas le droit d'instaurer des réserves qui seraient justifiées par un état de santé déficient de leurs assurés, de telles réserves étant en revanche admissibles dans le domaine de la prévoyance plus étendue, ainsi qu'en matière de prévoyance facultative (
ATF 115 V 223
consid. 6; VIRET, La jurisprudence récente du Tribunal fédéral des assurances en matière de prévoyance professionnelle [à l'exception du libre passage], Journée 1991 de droit du travail et de la sécurité sociale, in: Le droit en pratique, vol. 4, p. 10 s.).
Pour que l'on puisse considérer que la capacité de gain d'une personne jusqu'alors invalide s'est améliorée dans une mesure permettant un assujettissement à l'assurance obligatoire (pour les personnes à demi invalides au sens de la LAI, les montants-limites fixés aux art. 2, 7, 8 et 46 LPP sont réduits de moitié;
art. 4 OPP 2
), il est nécessaire que cette amélioration ait été d'une certaine durée et qu'aucune aggravation prochaine ne soit à craindre. Sinon, même dans le cas d'atteintes à la santé irréversibles, un engagement temporaire ou une simple tentative de réadaptation, durant une courte période de rémission
BGE 118 V 158 S. 167
de la maladie, suffirait à entraîner une affiliation à l'assurance et, partant, le droit à des prestations d'invalidité de l'institution de prévoyance. Cette conséquence contredirait à l'évidence le but recherché par l'
art. 1er al. 1 let
. d OPP 2. On ne saurait au surplus admettre que l'amélioration est réputée durable dès qu'elle a duré trois mois sans interruption notable, comme le prévoit l'
art. 88a al. 1 RAI
- encore que cette disposition réserve expressément l'hypothèse où une complication prochaine est à craindre. Ce délai de trois mois au-delà duquel la rente de l'assurance-invalidité doit, en principe, être réduite ou supprimée ne peut être appliqué schématiquement quand il s'agit de décider de l'assujettissement d'une personne à la LPP. Pour trancher cette question, on tiendra compte, bien plutôt, des circonstances du cas particulier, notamment de la nature de l'affection, du pronostic du médecin et des motifs qui ont conduit à l'engagement de l'intéressé. Aussi ne saurait-on conclure au rétablissement de la capacité de gain d'une personne invalide lorsqu'une tentative de réinsertion professionnelle, d'une durée même supérieure à trois mois, est essentiellement motivée par des considérations d'ordre social et qu'il apparaît improbable qu'elle aboutisse à une véritable réadaptation.
f) En l'espèce, le recourant souffre d'une grave affection psychique depuis son adolescence. Il n'a pu faire un apprentissage et n'a jamais été en mesure d'exercer une activité professionnelle, sous réserve de tentatives rapidement vouées à l'échec. Comme cela ressort des pièces, il a été régulièrement suivi, depuis 1981, par le Centre psycho-social cantonal, en raison d'un état psychotique compliqué, justement, par des échecs professionnels et une inadaptation sociale. En outre, il a séjourné à plusieurs reprises dans un établissement psychiatrique. De fait, l'assurance-invalidité lui a reconnu une incapacité permanente et totale de gain depuis le 1er juillet 1982. Certes, le versement de la rente a été suspendu pendant la détention de l'assuré, mais c'était pour des raisons indépendantes de l'état de santé de ce dernier (voir
ATF 113 V 276
consid. 2a). Dans l'ordre normal des choses, la caisse de compensation eût dû reprendre d'office le service de la rente au moment où l'assuré a été autorisé à subir sa peine sous forme de semi-liberté, en novembre 1986 (
ATF 107 V 223
consid. 4). Mais le tuteur de l'assuré et le secrétariat de la commission de l'assurance-invalidité sont convenus, en mars 1987, de laisser "le dossier en suspens", compte tenu de la procédure qui était alors pendante devant le Tribunal fédéral des assurances et des perspectives de travail qui s'offraient à
BGE 118 V 158 S. 168
l'assuré. De l'aveu même du tuteur, une insertion durable dans la vie professionnelle était cependant tout à fait aléatoire, eu égard à la nature de l'affection en cause et à la personnalité de l'intéressé. En fait, comme l'a exposé la CPC, il n'est pas rare que des services sociaux, des sociétés de patronage ou des associations d'entraide sollicitent une collectivité publique d'occuper des personnes qui ne peuvent trouver un emploi dans le secteur privé de l'économie. Or, la commune de C. a sans nul doute engagé le recourant pour répondre à une demande de ce genre.
g) Dans un tel contexte, il faut admettre que le recourant était entièrement invalide au moment où ont débuté les rapports de travail. Qu'il ait été en mesure d'accomplir durant quelques mois (apparemment jusqu'en automne 1987) les tâches qui lui ont été confiées par son employeur n'est pas décisif. Raisonnablement et objectivement, il n'était pas possible de considérer que sa nouvelle activité pût déboucher sur une insertion durable dans la vie professionnelle. Le recourant ne pouvait ainsi être assujetti à la LPP. Partant, il ne saurait prétendre une rente de cette assurance.
h) Quant au point de savoir si c'est à tort ou à raison que la caisse de compensation a supprimé la rente du recourant pour la période du 30 juin 1987 au 30 avril 1988 (en raison de la prise d'une activité et conformément à l'
art. 88a RAI
), il n'a pas à être examiné ici.
5.
Il faut encore se demander si le recourant peut déduire une prétention dans le cadre de la prévoyance plus étendue.
a) Dans le domaine de la prévoyance plus étendue, les institutions de prévoyance sont libres d'assurer des personnes invalides, pour leur capacité résiduelle de gain (HÄBERLE, loc.cit., p. 142). Le cas échéant, elles ont la possibilité d'instituer une réserve, limitée ou non dans le temps, pour l'affection qui est à l'origine de l'invalidité. Si l'assuré a commis une réticence, l'on applique, en l'absence de dispositions statutaires ou réglementaires idoines, les règles des
art. 4 ss LCA
(
ATF 116 V 218
).
b) Dans le cas particulier, la CPC assurait une part du salaire qui n'était pas soumise aux règles de la LPP (prévoyance sous-obligatoire). Sur un plan plus général, il lui était loisible, dans le cadre de la prévoyance plus étendue et s'agissant d'une personne invalide, d'assurer un gain supérieur au minimum légal de coordination (avec ou sans réserve). On notera d'ailleurs que, selon l'art. 6 de son règlement (version du 31 janvier 1980), l'affiliation a lieu de plein droit, dès l'entrée en fonction de l'employé; il n'est prévu aucune exception à l'affiliation en raison de l'invalidité de celui-ci.
BGE 118 V 158 S. 169
Mais la CPC ignorait, à l'époque, que le recourant avait été mis au bénéfice d'une rente de l'assurance-invalidité. Elle n'a formulé aucune réserve et, du reste, l'intéressé n'a pas été invité à fournir des renseignements au sujet de son état de santé. Aussi bien l'intimée a-t-elle fait valoir qu'elle n'aurait en aucun cas accepté une affiliation "facultative", si elle avait été dûment informée. Elle en déduit qu'aucun contrat de prévoyance n'a pu être conclu, en l'absence de déclaration de volonté de sa part.
c) Cette question touchant à l'existence d'un accord explicite de l'institution de prévoyance peut cependant rester indécise. Bien que la LCA ne soit pas directement applicable en matière de prévoyance professionnelle, il est possible de se référer à certaines de ses dispositions, par analogie et à titre subsidiaire (
ATF 116 V 225
consid. 4b,
ATF 112 II 249
in fine). Selon l'
art. 9 LCA
, le contrat d'assurance est nul si, au moment où il a été conclu, le sinistre était déjà survenu. Cette règle est l'expression légale du principe général déjà mentionné; elle est au demeurant considérée comme d'ordre public (cf. VIRET, Droit des assurances privées, p. 82). En raison de sa portée et de son caractère, il se justifie de l'appliquer en l'espèce, à tout le moins en l'absence de règle statutaire spéciale. En l'occurrence, le recourant, on l'a vu, étant invalide à 100 pour cent dès le début déjà des rapports de service. Il n'existait aucune capacité restante de gain qui puisse être assurée. Par conséquent, même en admettant que le règlement de la CPC ne faisait pas obstacle à l'affiliation d'un assuré invalide, dans le cadre de la prévoyance plus étendue, le recourant ne pourrait de toute façon pas bénéficier d'une prestation issue de ce régime.
6.
De ce qui précède, il résulte que le recours de droit administratif est mal fondé.
La question d'une éventuelle restitution des cotisations perçues à tort ne fait pas l'objet de la présente procédure. On ne saurait donc l'examiner et encore moins la préjuger.
7.
La procédure se rapporte à des prestations d'assurance, de sorte qu'il n'y a pas lieu de percevoir des frais de justice (
art. 134 OJ
).
La CPC, qui obtient gain de cause et qui est représentée par un avocat, a d'autre part conclu au versement d'une indemnité de dépens. Aux termes de l'
art. 159 al. 2 OJ
in fine, aucune indemnité pour les frais de procès n'est allouée, en règle ordinaire, aux organismes chargés de tâches de droit public. Cela vaut pour la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents et, sauf cas très
BGE 118 V 158 S. 170
particuliers, pour les caisses-maladie, les assureurs privés qui participent à l'application de la LAA (voir
ATF 112 V 49
consid. 3 et les arrêts cités), ainsi que pour les institutions de prévoyance en faveur du personnel (
ATF 112 V 362
). En l'espèce, rien ne justifie que l'on s'écarte de ce principe.