Urteilskopf
129 V 396
61. Arrêt dans la cause ASSURA, assurance maladie et accident, contre B., et Tribunal cantonal de la République et canton du Jura
K 58/03 du 24 juillet 2003
Regeste
Art. 64 Abs. 1 und 2,
Art. 79 KVG
(in der bis 31. Dezember 2002 gültig gewesenen Fassung): Subrogation des Krankenversicherers und Kostenbeteiligung des Versicherten.
Die in
Art. 79 KVG
vorgesehene gesetzliche Subrogation lässt Raum für eine direkte Klage des Geschädigten gegen den Dritten, der für den durch die Krankenversicherung nicht obligatorisch gedeckten Schaden haftet. Der nicht gedeckte Teil, der Gegenstand einer solchen Klage bilden kann, beinhaltet insbesondere die Franchise und den Selbstbehalt an den Behandlungskosten, welche nach Gesetz unter dem Titel Kostenbeteiligung zu Lasten des Versicherten gehen (
Art. 64 Abs. 1 und 2 KVG
).
Die Praxis einzelner Kassen, welche die Gesamtheit der medizinischen Kosten, zumindest im Sinne eines Vorschusses, vergüten, um anschliessend die Kostenbeteiligung des Versicherten in ihre Klage gegen den haftbaren Dritten miteinzubeziehen, ist nicht gesetzeskonform.
A.-
B. était affilié à Assura, assurance maladie et accident (ci-après: Assura), lorsqu'il fut victime d'un accident au centre de loisirs X. le 20 novembre 1999. Selon une lettre adressée le 24 novembre 1999 par le prénommé à la société Y. SA, qui exploite le centre X., il prenait place à l'intérieur d'une bouée au départ d'un toboggan lorsque celle-ci s'est mise en mouvement, avant qu'il ne soit correctement installé. Il a basculé en arrière et a heurté les rouleaux entraîneurs avec le dos. Il s'est rendu le 22 novembre 1999 aux urgences de l'hôpital Z., où fut posé le diagnostic de fracture costale D5/6, d'épanchement pleural, de scoliose et d'altération vertébrale accentuée.
Assura a pris en charge les suites de cet accident, sans déduire de ses prestations une participation de l'assuré aux coûts sous la forme d'une franchise ou d'une quote-part des frais. Chaque décompte de prestations adressé à l'assuré comportait l'information suivante: "La responsabilité d'une tierce personne étant engagée dans ce cas, nous avançons nos prestations sans participation légale (à bien plaire) conformément à l'
art. 79 LAMal
. Nous nous réservons le droit de récupérer, soit auprès de vous-même, soit auprès du tiers responsable, la participation qui vous incombe, conformément à l'
art. 64 LAMal
."
Le 10 juillet 2000, B. et G. Assurances, qui assurait Y. SA en responsabilité civile, ont conclu une convention d'indemnité aux termes de laquelle l'assurance s'engageait à verser un montant de 5'000 fr. à titre d'"indemnité transactionnelle à bien plaire, pour solde de tout compte et sans reconnaissance de responsabilité".
Assura s'adressa elle aussi à G. Assurances pour obtenir le remboursement de ses prestations. Le 14 novembre 2000, elle accepta la proposition de l'assureur en responsabilité civile de lui verser un montant limité à 1'559 fr. 65, sur la base d'une responsabilité de 50%. Par lettre du 26 juillet 2001, elle informa B. de cette transaction et lui demanda de rembourser le solde de la participation aux
BGE 129 V 396 S. 398
frais qu'elle avait avancée, soit 1'007 fr. 15 après déduction du montant versé par G. Assurances. Après un échange de correspondance avec l'assuré, elle a, par décision du 3 avril 2002 et décision sur opposition du 28 mai 2002, réduit à 454 fr. 70 le montant exigé.
B.-
B. a déféré la cause au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura. En cours de procédure, Assura a revu ses prétentions à la baisse, en ce sens qu'elle n'exigeait plus de l'assuré que le paiement d'un montant de 402 fr. 95.
Par jugement du 5 mars 2003, la juridiction cantonale a admis le recours, constaté que le montant de 402 fr. 95 exigé par Assura n'était pas dû, et alloué à l'assuré une indemnité de dépens de 860 fr. 80.
C.-
Assura interjette un recours de droit administratif contre ce jugement, dont elle demande l'annulation. Elle conclut à ce que B. soit condamné à lui payer un montant de 402 fr. 95. L'intimé conclut au rejet du recours, sous suite de frais et dépens, alors que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:
1.1
Selon l'
art. 79 LAMal
, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002 - applicable en l'espèce, dès lors que le litige porte entièrement sur des faits survenus avant son abrogation par la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) et ses dispositions d'application, le 1er janvier 2003 (cf.
ATF 127 V 467
consid. 1,
ATF 121 V 366
consid. 1b; voir également l'
ATF 127 V 401
consid. 1) -, l'assureur est subrogé, jusqu'à concurrence des prestations légales,
aux droits de l'assuré contre tout tiers responsable, dès la survenance de l'éventualité assurée. Dans la mesure où ce transfert de créance n'intervient que jusqu'à concurrence des prestations légales, il laisse place à une action directe du lésé contre le tiers responsable, mais uniquement pour le dommage non couvert, à titre obligatoire, par l'assureur-maladie (découvert). L'assuré perd en revanche son pouvoir de disposer des droits transférés (
ATF 124 V 177
sv. consid. 3b et les références citées; WALTER FELLMANN, Regress und Subrogation: allgemeine Grundsätze, in: Haftpflicht- und Versicherungsrechtstagung 1999, Saint-Gall 1999, p. 10 sv., GHISLAINE FRÉSARD-FELLAY, Le droit de recours contre le tiers responsable selon la loi fédérale sur l'assurance-maladie
BGE 129 V 396 S. 399
[LAMal], in: LAMal - KVG, Recueil de travaux en l'honneur de la Société suisse de droit des assurances, Lausanne 1997, p. 624 sv.).
1.2
Le découvert pouvant faire l'objet d'une action directe du lésé comprend en particulier la franchise et la quote-part des frais de traitement, que la loi impose de laisser à la charge de l'assuré à titre de participation aux coûts des prestations dont il bénéficie (
art. 64 al. 1 et 2 LAMal
). Aussi la subrogation légale prévue à l'
art. 79 LAMal
ne concerne-t-elle pas ce poste du dommage (JANA BURYSEK, Le point de vue et la pratique d'un assureur-maladie social, in: Colloques et Journées d'étude de l'IRAL, 1999-2001, Lausanne 2002, p. 692; RUDOLF LUGINBÜHL, Der Regress des Krankenversicherers, in: Haftpflicht- und Versicherungsrechtstagung 1999, Saint-Gall 1999, p. 51; FRÉSARD-FELLAY, op. cit., p. 632). Vu le caractère obligatoire de la participation de l'assuré aux coûts, l'assureur-maladie ne saurait renoncer à la percevoir pour l'inclure ensuite dans son action contre le tiers, la responsabilité de ce dernier fût-elle clairement établie (LUGINBÜHL, loc. cit.).
1.3
Conformément à l'
art. 123 OAMal
, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, applicable en l'espèce (cf. consid. 1.1 supra), le découvert laissé à la charge de l'assuré fait l'objet d'un droit préférentiel en sa faveur, ce qui réduit d'autant la prétention récursoire de l'assureur lorsque les sommes recouvrées auprès du tiers responsable ne suffisent pas à couvrir l'entier du dommage (BURYSEK, op. cit., p. 694; LUGINBÜHL, op. cit., p. 52; ALEXANDRA RUMO-JUNGO, Haftpflicht und Sozialversicherung: Begriffe, Wertungen und Schadenausgleich, Fribourg 1998, n. 1003, FRÉSARD-FELLAY, op. cit., p. 634 sv.).
2.
Bien qu'il ne soit pas conforme au système légal, l'exercice d'un recours "brut" - c'est-à-dire d'un recours comprenant la franchise et la participation - semble correspondre à la pratique de certaines caisses, qui invoquent l'intérêt de l'assuré: celui-ci se voit rembourser ses frais médicaux en totalité, du moins à titre d'avances, et se trouve par ailleurs dispensé de démarches à l'égard du tiers responsable (voir ANDREAS KUMMER, Obligation d'avance des prestations et recours, in: CAMS actuel, organe du Concordat des assureurs-maladie suisses, 1998, p. 83). L'assureur-maladie n'est cependant pas titulaire de la créance qu'il fait valoir auprès du tiers responsable, pour le poste du dommage correspondant à la participation de l'assuré aux coûts; il ne se voit pas davantage confié par la loi le pouvoir de représenter l'assuré en vue d'en obtenir l'indemnisation.
3.1
Conformément à la pratique décrite ci-dessus, Assura a avancé la totalité de ses prestations pour s'adresser ensuite à l'assureur en responsabilité civile de Y. SA. Elle a passé avec cet assureur une transaction sur la base d'un taux de responsabilité de 50% de l'assuré. Elle a déduit du montant de la franchise et de la quote-part l'intégralité du montant perçu, en partant de l'idée que la somme de 5'000 fr. versée directement à l'assuré par G. Assurances ne comprenait pas ce poste et en application du droit préférentiel du lésé. La question se pose donc de savoir si l'intimé est en droit de refuser de payer le solde de la franchise et de la quote-part non récupéré par l'assureur-maladie, autrement dit si le solde doit rester à la charge de cet assureur. Les premiers juges y ont répondu par l'affirmative, en se plaçant sur le terrain de la gestion d'affaires. Ils ont admis que la caisse avait commis une négligence dans la gestion des intérêts de l'assuré en liquidant le cas sur la base d'une responsabilité partagée.
3.2
L'
art. 79 LAMal
ne permet pas à l'assuré d'exiger de la caisse qu'elle fasse valoir, contre le tiers responsable, les droits qui lui ont été légalement cédés; a fortiori celui-ci ne saurait-il exiger qu'elle effectue des démarches en vue de l'aider à recouvrer des créances pour lesquelles elle ne bénéficie d'aucune subrogation. Par conséquent, si l'assuré entend récupérer son découvert auprès du tiers, il lui appartient d'agir directement contre ce dernier. L'intimé l'a du reste fait, à tout le moins pour certains postes du dommage non couvert par l'assureur-maladie, en concluant avec G. Assurances une transaction portant sur un montant de 5'000 fr.
Cela étant, même en admettant la construction juridique adoptée par la juridiction cantonale, on voit mal en quoi Assura aurait porté préjudice à l'intimé en l'aidant à récupérer un montant supplémentaire de 1'559 fr. 65. Dès lors qu'il n'a jamais été partie à la convention passée entre la caisse-maladie et G. Assurances, rien ne l'empêchait de s'adresser une nouvelle fois à Y. SA ou à son assureur en responsabilité civile s'il estimait être en mesure d'encaisser un montant plus élevé. Qu'il ait déjà liquidé définitivement tout ou partie de ses prétentions directes à l'encontre du tiers responsable par l'acceptation d'une somme forfaitaire de 5'000 fr., en s'exposant à ce que ce règlement lui soit par la suite opposé, à tort ou à raison, en cas de nouvelles prétentions, n'est pas imputable à la recourante. En particulier, l'assuré ne saurait prétendre avoir été induit en erreur par le comportement de la caisse, qui l'avait expressément informé
BGE 129 V 396 S. 401
du fait qu'elle pourrait exiger la restitution des prestations avancées (franchise et quote-part).
Au demeurant, l'intimé ne peut guère reprocher de faute à l'assureur-maladie pour avoir transigé sur la base d'une responsabilité partagée de Y. SA: la convention d'indemnisation qu'il avait lui-même conclue prévoyait le versement d'une somme forfaitaire à bien plaire, sans reconnaissance de responsabilité de la part de G. Assurances et pour solde de tout compte.
4.
Vu ce qui précède, il appartient à l'intimé de payer le solde de la participation aux frais de traitement, non couvert par le montant versé par G. Assurances à la recourante. Selon la décision sur opposition litigieuse, ce solde correspond à un montant de 454 fr. 70. Toutefois, selon un nouveau décompte adressé par acte du 4 décembre 2002 à la juridiction cantonale, l'assureur-maladie propose de ne plus retenir qu'un solde de 402 fr. 95, non contesté en tant que tel par l'intimé. Il n'y a pas de motif de s'écarter de cette proposition, qui correspond également aux conclusions de la recourante en procédure fédérale, mais qui implique la réforme de la décision sur opposition litigieuse.