Urteilskopf
132 III 731
87. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause Succession X. contre Autorité de Surveillance du Registre du Commerce (recours de droit administratif)
4A.12/2006 du 19 septembre 2006
Regeste
Wiedereintragung einer im Handelsregister gelöschten Gesellschaft.
Der Gläubiger, der vom Handelsregisteramt die Wiedereintragung einer gelöschten Gesellschaft verlangt, muss den Bestand seiner Forderung und sein Interesse an der Wiedereintragung glaubhaft machen (E. 3.2 und 3.4).
Wurde eine Gesellschaft nach ihrem Konkurs gelöscht, so kann der Gläubiger ihre Wiedereintragung verlangen, wenn er eine Schadenersatzforderung der gelöschten Gesellschaft gegen ihre Organe glaubhaft macht. Die Wiedereintragung hat dann zum Ziel, dem Gläubiger zu ermöglichen, von der Gläubigergemeinschaft die Abtretung der Gesellschaftsforderung auf Schadenersatz zu verlangen (E. 3.3). Diese Bedingung war im vorliegenden Fall nicht erfüllt (E. 3.5).
Le 5 décembre 2000, la Succession X. a vendu le capital-actions d'une société immobilière (ci-après: SI) à la société A. Le contrat prévoyait notamment que la vente était faite et acceptée moyennant attribution à l'immeuble propriété de la SI d'une valeur brute de 3'350'000 fr. dont à déduire les hypothèques, les intérêts et les frais, selon un décompte à établir ultérieurement. D'après décompte du 10 janvier 2001, le solde en faveur de la Succession s'élevait à 1'452'220 fr. 50.
Le 1
er
novembre 2001, la Succession a adressé à l'administrateur de A. un autre décompte acheteur-vendeur qui faisait apparaître un solde de 69'023 fr. 50 en sa faveur. Celui-ci se composait des frais d'entretien de l'immeuble du 1
er
janvier au 31 mars 2001 avancés par la Succession et des intérêts hypothécaires pour l'année 2000 que le nouvel actionnaire devait prendre en charge.
Le 14 décembre 2001, la SI a été dissoute et mise en liquidation. La Succession a produit une créance de 69'023 fr. 50 dans la liquidation, considérant que cette dernière était solidairement débitrice de cette somme avec A.
Au moment de sa mise en liquidation, la SI a conclu avec A. une convention de cession portant sur tous ses actifs et passifs, en référence à l'
art. 181 CO
. Les actifs étaient composés notamment de l'immeuble et les passifs d'une dette hypothécaire.
Le 1
er
mars 2002, la Succession a imparti à A. un ultime délai pour payer le montant réclamé.
Le 14 mai 2002, la Succession a fait notifier à la SI en liquidation et à A., poursuivies solidairement, des commandements de payer portant sur la somme de 69'023 fr. 50 plus intérêt, auxquels il a été fait opposition.
Le 2 mai 2003, la Succession a introduit auprès du Tribunal de première instance du canton de Genève une action en reconnaissance de dette et en paiement du montant susmentionné à l'encontre de la SI en liquidation et de A., en tant que débitrices solidaires.
Le 1
er
octobre 2003, la SI en liquidation a requis sa radiation. Le Préposé a renvoyé la Succession, qui avait formé opposition, auprès du juge pour qu'elle requiert à titre provisionnel une interdiction
BGE 132 III 731 S. 733
de procéder à la radiation. La requête déposée en ce sens par la Succession a été rejetée par ordonnance du 4 novembre 2003. Contre cette ordonnance, la Succession a recouru en vain auprès de la Cour de justice et auprès du Tribunal fédéral (cf. cause 4P.85/2004 du 14 juin 2004).
Le 3 juin 2005, la SI en liquidation a été radiée.
Le Tribunal de première instance, saisi de l'action en reconnaissance de dette introduite en mai 2003, a suspendu l'instance en raison de la radiation d'une des parties au litige.
Le 15 décembre 2005, l'avocat nommé d'office pour administrer la Succession a saisi le registre du commerce d'une requête en réinscription de la SI en liquidation. Il a invoqué la créance de 69'023 fr. 50 dont il soutenait que tant A. que la SI étaient débitrices et a indiqué qu'il était impératif que la réinscription ait lieu, afin qu'il puisse obtenir un jugement contre la SI.
Le Préposé a rejeté cette requête par décision du 3 février 2006, ce qu'a confirmé l'Autorité de surveillance le 19 avril 2006. Les juges ont considéré en substance que la Succession n'avait pas suffisamment rendu vraisemblable l'existence de prétentions à l'encontre de la SI en liquidation et qu'elle n'avait au surplus aucun intérêt à obtenir la réinscription.
Contre la décision du 19 avril 2006, la Succession interjette un recours de droit administratif au Tribunal fédéral.
Extrait des considérants:
3.
La recourante reproche en substance à l'Autorité de surveillance d'avoir outrepassé ses compétences en statuant définitivement sur les conditions de droit matériel de la réinscription de la SI au registre du commerce, alors qu'il appartenait au juge ordinaire de le faire.
3.1
L'existence juridique d'une société anonyme en liquidation cesse lorsque, à l'issue de la liquidation, celle-ci est radiée du registre du commerce (
ATF 117 III 39
consid. 3b). Il est cependant possible si, après la clôture de la liquidation, des biens ou des prétentions non pris en compte sont découverts (cf. FORSTMOSER/MEIER-HAYOZ/NOBEL, Schweizerisches Aktienrecht, Berne 1996, § 56 ch. 154), que la société radiée soit réinscrite au registre du commerce, sous certaines conditions (arrêt du Tribunal fédéral 4A.3/1993 du 29 juillet 1993, consid. 1a).
BGE 132 III 731 S. 734
3.2
La jurisprudence a précisé qu'un créancier social de la société radiée peut requérir la réinscription, dans la mesure où il rend vraisemblable l'existence de sa créance et son intérêt à la réinscription (cf. arrêt 4A.3/1993 précité, consid. 1b). Un tel intérêt fait défaut lorsque le créancier est en mesure de recouvrer sa créance par une autre voie dont on peut raisonnablement exiger qu'il la suive ou que la société n'a plus d'actifs réalisables (
ATF 121 III 324
consid. 1;
ATF 115 II 276
consid. 2;
ATF 110 II 396
consid. 2;
ATF 100 Ib 37
consid. 1 p. 38 et les arrêts cités).
Il convient de souligner qu'il ne saurait appartenir ni au préposé au registre du commerce, ni à l'autorité de surveillance de statuer définitivement sur les conditions de droit matériel afférentes à une inscription ou à une radiation audit registre; cette tâche incombe, dans les cas litigieux, au juge ordinaire (cf.
ATF 115 II 276
consid. 2;
ATF 110 II 396
consid. 2 p. 397). Les autorités du registre du commerce ne peuvent en effet priver le créancier de la possibilité d'intenter un procès à la société (arrêt 4A.3/1993 précité, consid. 1b;
ATF 100 Ib 37
consid. 1 p. 38). Il ne faut donc pas se montrer strict lors de l'appréciation des conditions requises pour obtenir la réinscription d'une société au registre du commerce (cf.
ATF 115 II 276
consid. 2 in fine) et ne rejeter que les requêtes qui paraissent abusives (cf. MEISTERHANS, Prüfungspflicht und Kognitionsbefugnis der Handelsregisterbehörde, thèse Zurich 1996, p. 287). Tel est le cas de celui qui demande la réinscription, alors qu'il ne peut se prévaloir d'aucun intérêt juridique à l'obtenir (arrêt 4A.3/1993 précité, consid 1b in fine;
ATF 100 Ib 37
consid. 1 p. 38).
3.3
Il est admis en pratique que le créancier social qui fait valoir, en plus de sa créance, des prétentions au sens des
art. 756 ss CO
dispose de la faculté d'obtenir la réinscription d'une société radiée du registre du commerce après clôture de la faillite (cf. arrêt 4A.3/ 1993 précité, consid. 1a;
ATF 110 II 396
consid. 2; BÜRGI/NORDMANN-ZIMMERMANN, Commentaire zurichois, n. 12 ad
art. 746 CO
). Le but de la réinscription est, dans cette hypothèse, de permettre au créancier d'obtenir de la communauté des créanciers, en cas de faillite, la cession de la prétention en dommages-intérêts que celle-ci pouvait faire valoir contre l'organe en réparation du préjudice causé à la société (
art. 260 LP
; cf.
ATF 110 II 396
consid. 2 p. 397; arrêt 4C.162/1998 du 11 décembre 1998, consid. 4b non publié à l'
ATF 125 III 86
; sur la procédure, cf.
ATF 132 III 564
consid. 3.2.2). Est donc visé le cas où le comportement illicite d'un organe a
BGE 132 III 731 S. 735
causé un dommage direct à la société et non au créancier, car, si celui-ci avait été lésé directement, il disposerait d'une action contre l'organe en question, qu'il pourrait faire valoir indépendamment de la dissolution de la société (cf.
ATF 132 III 564
consid. 3.2.1) et n'aurait de ce fait aucun intérêt à obtenir la réinscription de cette dernière. A l'instar des autres hypothèses justifiant la réinscription et même s'il convient de ne pas se montrer strict, il faut que le créancier rende sa prétention vraisemblable (cf. supra consid. 3.2).
3.4
En l'espèce, la créance de 69'023 fr. 50 que fait valoir la recourante pour justifier la réinscription correspond à des avances faites à la SI du 1
er
janvier au 31 mars 2001 et à des intérêts hypothécaires dus au 31 décembre 2000. Il ressort cependant des constatations cantonales que ce montant équivaut au solde du décompte acheteur-vendeur établi par la recourante à l'attention de A. le 1
er
novembre 2001, conformément au contrat de vente qu'elle avait conclu avec cette dernière le 5 décembre 2000 portant sur le capital-actions de la SI et qui comprenait en particulier l'attribution d'un immeuble d'une valeur brute de 3'350'000 fr. dont à déduire les hypothèques, les intérêts et les frais selon décompte à établir ultérieurement. Ces circonstances font apparaître qu'à supposer que la créance de 69'023 fr. 50 soit fondée, A. en serait à tout le moins débitrice solidaire. Cette conclusion est encore renforcée par le fait que, le 14 décembre 2001, soit au moment de sa dissolution, la SI a conclu une convention de cession avec A. portant sur tous ses actifs et passifs.
La recourante ne s'y est du reste pas trompée, puisqu'elle a commencé par exiger, le 1
er
novembre 2001, le remboursement des 69'023 fr. 50 à l'acheteuse, en se fondant sur un décompte acheteur-vendeur. C'est seulement par la suite qu'elle a également réclamé ce montant à la SI et qu'elle a intenté des poursuites à l'encontre de ces deux sociétés. Quant à l'action en reconnaissance de dette et en paiement de 69'023 fr. 50 introduite par la recourante en mai 2003, elle a été déposée à l'encontre non seulement de la SI, mais aussi de A. solidairement.
C'est donc à juste titre que l'Autorité de surveillance a considéré que la recourante n'avait aucun intérêt à la réinscription de la SI radiée s'agissant de la créance de 69'023 fr. 50 invoquée, puisqu'elle pouvait s'en prendre à A. et qu'une action en justice était du reste déjà pendante contre cette dernière.
BGE 132 III 731 S. 736
3.5
Il reste à examiner si des prétentions issues d'un acte illicite des organes de la SI, également invoquées par la recourante, sont de nature à justifier la réinscription de la société radiée.
La recourante se fonde sur les articles 756 ss CO. Ces dispositions ne lui permettent toutefois pas d'exiger des autorités du registre du commerce qu'elles réinscrivent la société, puisque la SI n'a pas été mise en faillite. En effet, comme on l'a vu, la réinscription doit permettre au créancier d'obtenir la cession d'une prétention en dommages-intérêts de la société (cf. supra consid. 3.3). Or, en dehors de toute faillite, seule la société ou un actionnaire peut agir (cf.
art. 756 CO
). La recourante n'est donc pas en droit de demander la réparation du préjudice social.
Au demeurant, dans son recours au Tribunal fédéral, la recourante, sous le couvert des
art. 756 ss CO
, ne fait pas valoir un dommage de la société, mais se prévaut du préjudice qu'elle aurait elle-même directement subi en raison d'un acte illicite commis par l'administrateur de la SI. Cependant, dans un tel cas et comme la recourante le reconnaît du reste dans son mémoire, elle peut s'en prendre à l'organe directement (cf.
ATF 132 III 564
consid. 3.2.1), ce qui lui ôte tout intérêt à obtenir que la société soit réinscrite (cf. supra consid. 3.3).
On peut ajouter qu'il appartenait à la recourante, qui adressait une demande au registre du commerce dans son propre intérêt, de motiver sa requête (MOOR, Droit administratif, vol. I, Berne 2002, ch. 2.2.6.3 p. 260), en rendant vraisemblable sa créance. La recourante, qui s'est contentée d'invoquer pour la première fois devant l'Autorité de surveillance une action en responsabilité sans autres précisions, ne peut ainsi reprocher à cette autorité judiciaire d'avoir refusé de réinscrire la société radiée sur cette base.
Dans ces circonstances, c'est à juste titre que les autorités cantonales du registre du commerce ont refusé la demande de réinscription présentée par la recourante, tant sous l'angle de l'intérêt que de la vraisemblance.
Le recours doit donc être rejeté.