Urteilskopf
141 III 141
20. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause A. contre Banque B. et Etablissement d'assurance contre l'incendie et les éléments naturels du canton de Vaud (ECA) (recours en matière civile)
5A_852/2014 du 23 mars 2015
Regeste
Art. 17 und 140 Abs. 2 SchKG
,
Art. 39 VZG
; Lastenverzeichnis, Rechtsweg.
Unterscheidung zwischen Beschwerde und Lastenbereinigungsklage; Form der Bestreitung (E. 4.2).
Rechtsweg im Fall, dass der Schuldner die Anwendung des im Grundbuch eingetragenen Zinssatzes auf die Forderung und den Beginn des Zinsenlaufs bestreitet (E. 4.3).
A.
A. fait l'objet de la poursuite en réalisation de gage immobilier n° x exercée par l'Office des poursuites du district de Morges (ci-après: l'office) à l'instance de la Banque B. et de l'Etablissement
BGE 141 III 141 S. 142
cantonal d'assurance contre les incendies et les éléments naturels (ci-après: l'ECA), respectivement créancière hypothécaire en premier rang et bénéficiaire d'hypothèques légales privilégiées.
B.
Par pli recommandé du 3 octobre 2013, l'office a communiqué aux intéressés, soit notamment à A., l'état des charges relatif à l'immeuble grevé, avis leur étant donné que les charges invoquées seraient censées reconnues aussi bien quant à leur existence que quant à leur échéance, leur étendue et leur rang, si elles n'étaient pas contestées à l'office dans les dix jours dès la réception dudit avis.
L'état des charges mentionnait les hypothèques légales privilégiées en faveur de l'ECA, la cédule hypothécaire en premier rang de 700'000 fr. propriété de la Banque B., ainsi que quatre cédules hypothécaires au porteur grevant en deuxième rang la parcelle du débiteur. Ces dernières cédules, dont le porteur était inconnu, étaient chacune portées à l'état des charges pour le montant de leur capital, majoré des intérêts courant à compter du jour du dépôt de la réquisition de vente, soit dès le 5 janvier 2011, au taux d'intérêt de 10 % correspondant au taux maximum inscrit au Registre foncier.
C.
Par lettre du 21 octobre 2013, invoquant l'
art. 140 LP
, A. s'est opposé à l'état des charges, contestant le taux et le point de départ de l'intérêt arrêté pour les cédules en deuxième rang. Il a demandé l'application d'un intérêt de 5 % à partir du jour de la vente, faute de production des titres par le détenteur.
L'office refusant de donner suite à cette requête, réitérée les 1
er
novembre 2013 et 14 novembre 2013, A. a déposé une plainte pour déni de justice le 19 novembre 2013, qui n'a pas bénéficié de l'effet suspensif en dépit de nombreux recours jusqu'au Tribunal fédéral.
L'immeuble, objet du gage, a été vendu aux enchères publiques le 13 décembre 2013 et adjugé à la Banque B. Le même jour, le poursuivi a déposé une plainte tendant à l'annulation de l'adjudication.
Le 11 avril 2014, la Présidente du Tribunal d'arrondissement de La Côte, en sa qualité d'autorité inférieure de surveillance, a rejeté la plainte pour déni de justice du 19 novembre 2013.
Par arrêt du 17 octobre 2014, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours interjeté par A. et confirmé le prononcé entrepris.
D.
Saisi d'un recours en matière civile de A., le Tribunal fédéral l'a admis dans la mesure de sa recevabilité. Il a réformé l'arrêt entrepris
BGE 141 III 141 S. 143
en ce sens que l'office a été invité à donner suite à l'opposition du 21 octobre 2013 dans le sens des considérants.
(résumé)
Extrait des considérants :
4.2
A l'instar de l'état des charges dans la poursuite par voie de faillite (
art. 247 ss LP
; cf.
ATF 119 III 84
consid. 2) - qui fait partie intégrante de l'état de collocation (art. 125 al. 2 de l'ordonnance du Tribunal fédéral du 23 avril 1920 sur la réalisation forcée des immeubles [ORFI; RS 281.42]) -, l'état des charges dans la poursuite par voie de saisie ou de réalisation de gage (
art. 140 et 156 al. 1 LP
;
art. 34 ss et 102 ORFI
) est susceptible de plainte à l'autorité de surveillance (
art. 17 LP
) lorsque l'office des poursuites a violé des prescriptions formelles à l'occasion de son établissement (
ATF 120 III 20
consid. 1; arrêt 5A_275/2012 du 29 juin 2012 consid. 2.1 avec les citations; cf. pour la doctrine: INGRID JENT-SØRENSEN, Die Rechtsdurchsetzung bei der Grundstückverwertung in der Spezialexekution, 2003, p. 134 ss et les nombreuses références). En revanche, l'action en épuration de l'état des charges est ouverte lorsque le demandeur entend contester l'existence, l'étendue, le rang ou l'exigibilité d'un droit inscrit à l'état des charges (
art. 37 al. 2 ORFI
; JENT-SØRENSEN, op. cit., p. 178 ss; FRANÇOIS BOHNET, Actions civiles, 2014, § 124 avec les références). Cette distinction est consacrée de longue date par la jurisprudence (cf. notamment:
ATF 30 I 148
consid. 1;
38 I 273
;
43 III 302
consid. 1;
57 III 131
consid. 1;
ATF 140 III 234
consid. 3.1).
La contestation ne doit pas être motivée et ne doit pas non plus indiquer si elle porte sur la créance même, le droit de gage, le rang ou l'exigibilité (JENT-SØRENSEN, op. cit., n. 363 ss p. 151 ss; GERHARD KUHN, in Commentaire ORFI, 2012, n° 6 ad
art. 37 ORFI
et les références).
4.3
En l'espèce, selon l'arrêt entrepris, invoquant l'
art. 140 LP
, le recourant a "contesté le taux d'intérêt calculé aux cédules de deuxième rang" ainsi que la date de départ des intérêts au 5 janvier 2011. Plus particulièrement, il a fait valoir que devait figurer à l'état des charges l'intérêt moratoire ordinaire de 5 %, ainsi qu'il en allait pour la Banque B., et que les intérêts devaient courir dès le jour de la vente, dès lors que le détenteur des titres ne les avait pas produits.
Face à une telle requête, la Cour des poursuites et faillites ne pouvait se retrancher, par renvoi aux motifs de l'autorité inférieure de
BGE 141 III 141 S. 144
surveillance, derrière l'obligation, découlant de l'
art. 36 al. 2 ORFI
(cf. aussi
ATF 112 III 102
consid. 1;
ATF 121 III 24
consid. 2b et les références), pour l'office de porter à l'état des charges celles figurant dans l'extrait du Registre foncier. Il ne ressort pas du courrier du recourant que celui-ci aurait reproché à l'office d'avoir porté à l'état des charges le taux de 10 % ou qu'il se serait prévalu d'un autre défaut de nature formelle, comme une erreur de report ou une transcription peu claire ou incomplète, griefs pouvant faire l'objet d'une plainte. Il apparaît qu'il s'est plaint de l'application à la créance du taux d'intérêt de 10 % tel qu'il résultait du Registre foncier et du point de départ des intérêts. Contrairement à ce qu'a retenu l'autorité cantonale, il s'en est ainsi pris à l'étendue de la créance garantie (cf.
art. 818 CC
; cf. PIERRE-ROBERT GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, vol. II, 2000, n° 53 ad
art. 140 LP
; DÜRR/ZOLLINGER, Zürcher Kommentar, 2
e
éd. 2013, n
os
6 et 12 ad
art. 818 CC
), grief qui déclenchait l'ouverture de la procédure d'épuration des charges conformément aux
art. 106-109 LP
(art. 140 al. 2, 2
e
phrase, LP;
ATF 112 III 109
consid. 4a; arrêt 5A_272/2014 du 21 juillet 2014 consid. 4.1). Selon l'
art. 39, 1
re
phrase, ORFI, applicable par renvoi de l'
art. 102 ORFI
, l'office devait ainsi procéder conformément à l'
art. 107 al. 5 LP
, soit répartir les rôles dans la procédure d'épuration de l'état des charges (cf. pour les principes de répartition: art. 39, 2
e
phrase, ORFI; arrêt 5A_272/2014 du 21 juillet 2014 consid. 4.1) et assigner un délai péremptoire de vingt jours au demandeur pour ouvrir action (BOHNET, op. cit., p. 1366).