Urteilskopf
85 I 261
41. Arrêt de la IIe Cour civile du 8 octobre 1959 dans la cause Groslimond.
Regeste
Untergang des Grundeigentums und Preisgabe.
Voraussetzungen der Löschung im Grundbuch.
Art. 666, 964 und 965 ZGB
.
A.-
Maurice Groslimond, notaire à Reconvilier, est propriétaire de deux chemins, feuillets nos 335 et 363, sis sur la commune de Tavannes, grevés de divers droits de passage et de canalisation. Le 3 mai 1958, il requit la radiation de l'inscription de son droit de propriété. Le conservateur du registre foncier de Moutier refusa, le 12 février 1959, de procéder à cette opération, vu les servitudes grevant les immeubles. Le 24 avril suivant, le Conseil-exécutif bernois, en sa qualité d'autorité de surveillance, rejeta un recours formé contre cette décision. A son avis, l'Etat deviendrait propriétaire des parcelles abandonnées (art. 77 LACC).
B.-
Agissant par la voie du recours de droit administratif, Groslimond requiert le Tribunal fédéral d'annuler cette dernière décision et d'ordonner à l'office compétent d'effectuer la radiation.
Le Conseil-exécutif propose le rejet du recours, le Département fédéral de justice et police, son admission.
Considérant en droit:
1.
Les radiations d'inscriptions figurant au registre foncier ne peuvent être faites que sur la déclaration écrite de ceux auxquels l'inscription confère des droits (art. 964 al. 1 CC), au vu d'une légitimation préalable du requérant quant à son droit de disposition et au titre sur lequel se fonde l'opération (art. 965 al. 1 CC). L'un de ces titres est la déréliction, qui s'opère par radiation de l'inscription du propriétaire actuel; l'opération doit être requise par ce dernier; la déclaration sera faite par écrit au registre foncier et contiendra la requête de radiation (RO 50 II 232;
69 II 228
; LEEMANN, notes 2-17, et HAAB, notes 6-14 ad art. 666 CC; LIVER, Die Löschung infolge Unterganges des dinglichen Rechtes, ZBGR 1958 p. 321 ss.; GONVERS-SALLAZ, Le registre foncier suisse, note 4 ad art. 61 ORF;
BGE 85 I 261 S. 263
cf. aussi, dans ZBGR 1925 p. 58 s., l'arrêt zurichois confirmé par le Tribunal fédéral, RO 50 II 232). En l'espèce, le recourant ayant rempli les conditions légales de la radiation, celle-ci devait être opérée. Comme la déréliction s'impose d'ordinaire au propriétaire dont le droit est grevé outre mesure, le texte de la loi eût sans doute précisé que ce m otif ne pouvait être pris en considération si telle avait été la volonté du législateur.
2.
Le Conseil-exécutif exige, comme titre légitime, le consentement des titulaires des servitudes grevant les chemins. C'est certainement au droit de disposition qu'il songe (art. 965 al. 2 CC). Mais il lui échappe que les tiers titulaires de droits réels limités ne sont pas touchés par la radiation du droit de propriété du recourant (cf. les commentateurs HAAB et LEEMANN, loc.cit.).
3.
La décision attaquée prétend que le requérant abuse de son droit. La jurisprudence a déjà résolu ce point négativement (RO 50 II 235). C'est une autre question de savoir si les droits des tiers sont touchés par la déréliction. Par le moyen tiré de l'abus de droit, le conservateur ne saurait en tout cas redresser une situation dans laquelle ces tiers peuvent intervenir par les moyens que la loi leur donne. En outre, si l'Etat bernois interprète l'art. 77 LACC dans ce sens que les immeubles abandonnés deviennent sa propriété, il en supporte les conséquences; le droit cantonal ne saurait modifier le droit fédéral, fût-ce par détour.
Quant au recourant, s'il a gain de cause, il ne doit toutefois pas perdre de vue les obligations qui lui incombent encore d'après la doctrine et la jurisprudence qu'il cite lui-même (cf. RO 50 II 232). Il appartient aux intéressés de veiller à temps à ne pas perdre leurs droits.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
Le recours est admis, la décision attaquée est annulée et il est enjoint au conservateur du registre foncier de Moutier de procéder à la radiation requise par le recourant.