Urteilskopf
92 IV 75
19. Arrêt de la Cour de cassation penale du 17 juin 1966 dans la cause Föllmi contre Popper et consorts.
Regeste
Art. 29 StGB
.
Der Strafantrag gegen Unbekannt ist durchaus gültig; sein Urheber braucht ihn nicht in einen namentlichen Antrag umzuwandeln, wenn der Täter bekannt wird.
A.-
Le 24 mai 1963, Föllmi, titulaire de la marque horlogère "Le Duc", adressa au Procureur général, à Genève, une plainte pénale contre inconnu pour concurrence déloyale et contrefaçon de marque. Au cours de l'enquête, Popper, Héritier et Miserez furent inculpés de ces délits.
B.-
Le 31 janvier 1966, le Tribunal de police du canton de Genève a déclaré nulle l'action pénale dirigée contre les prénommés, à défaut notamment d'une plainte valable formée dans le délai de l'art. 29 CP.
C.-
La Cour de justice a déclaré irrecevable, le 4 avril 1966, l'appel interjeté par le Procureur général. Elle estime que, pour éviter la forclusion prévue par l'art. 29 CP, Föllmi aurait dû, dans le délai de trois mois à compter dujour où il a eu connaissance de l'identité des contrefacteurs, diriger sa plainte contre eux en les désignant nommément.
D.-
Contre cet arrêt, Föllmi se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Il conclut à ce que les juridictions genevoises soient invitées à donner suite à la procédure.
Extrait des motifs:
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'art. 29 CP détermine uniquement le jour où le droit de porter plainte s'éteint et non celui où il prend naissance; or il naît dès la lésion; il s'ensuit qu'une plainte contre inconnu est pleinement valable et que son auteur n'a pas à la convertir en plainte nominale après que le délinquant a été découvert (RO 68 IV 101;
73 IV 73
;
BGE 92 IV 75 S. 76
arrêt de la Cour pénale fédérale du 18 mars 1966 dans la cause Boillat et consorts, non publié).
La Cour de cassation pénale genevoise, qui a rendu en 1946 un arrêt auquel se réfèrent les premiers juges (Sem. jud. 1947 p. 284 ss.), objecte que, selon le texte même de l'art. 29 CP, le délai de plainte court (en allemand "beginnt", donc: commence à courir) du jour où l'ayant droit a connu l'auteur de l'infraction; qu'on ne peut porter plainte contre cet auteur avant de le connaître. Mais la cour de céans n'a pas méconnu ces évidences. Certes le délai de trois mois institué par l'art. 29 CP ne part que le jour où le lésé apprend qui est l'auteur de l'infraction. Toutefois il serait faux d'en déduire que le droit de porter plainte ne saurait exister plus tôt. Il prend naissance dès la lésion, mais ne commence à se prescrire que le jour où l'ayant droit connaît le délinquant.
La cour de cassation genevoise admet que le droit fédéral ne s'oppose pas à la plainte contre inconnu; cependant il s'agirait, d'après elle, du droit qu'a toute personne lésée de signaler une infraction - poursuivie ou non d'office en vue de la découverte du délinquant. En réalité ce droit n'est pas visé par les art. 28 ss. CP, qui ne concernent pas les infractions poursuivies d'office. Quand des auteurs comme HAFTER (Allg. Teil, p. 138 ch. 2) et GERMANN (Das Verbrechen, n. 6/4 ad art. 28-31) relèvent qu'une plainte contre inconnu n'est pas exclue, ils entendent nécessairement la plainte au sens technique du mot. Sans doute pourrait-il arriver que l'auteur d'une telle plainte soit empêché par suite de force majeure de la retirer à temps et qu'une condamnation intervienne contre son gré. Mais s'il devait, après l'identification du délinquant, transformer sa plainte primitive ou la renouveler, il pourrait aussi être empêché de le faire dans les trois mois, ce qui, contre sa volonté, assurerait l'impunité au prévenu. Ce risque n'est pas moins grand que l'autre. Il n'y a donc aucune raison de modifier la jurisprudence.