Urteilskopf
142 IV 125
19. Extrait de l'arrêt de la Cour de droit pénal dans la cause X. contre Ministère public central du canton de Vaud (recours en matière pénale)
6B_935/2015 du 20 avril 2016
Regeste
Art. 9 BV
;
Art. 354 Abs. 1,
Art. 353 Abs. 3 und
Art. 85 Abs. 2 StPO
. Zustellung eines Strafbefehls mittels einfacher Postsendung. Beweislast der Zustellung.
Stellt die Strafbehörde einen Strafbefehl entgegen der gesetzlichen Zustellungsmodalitäten gemäss
Art. 85 Abs. 2 StPO
mittels einfacher Postsendung zu, trägt sie die Beweislast für die erfolgte Zustellung und deren Datum. Der Nachweis des für den Fristenlauf zur Einsprache massgebenden Empfangsdatums des Adressaten kann nicht durch den Hinweis auf die übliche Beförderungsdauer bei Postsendungen erbracht werden (E. 4).
A.
Par ordonnance pénale du 10 juin 2015, la Préfecture du district de Lausanne a condamné X., pour infraction simple à la LCR, à une amende de 500 fr. convertible en 5 jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement dans le délai imparti, et a mis les frais de la procédure à la charge du prévenu. Cette ordonnance a été envoyée à son destinataire sous pli simple.
Le 2 juillet 2015, X. a formé opposition, en indiquant qu'il avait reçu l'ordonnance pénale le 23 juin 2015. Par courrier du 6 juillet 2015, la préfecture l'a informé qu'elle maintenait l'ordonnance et que l'opposition lui apparaissait tardive. En conséquence, elle transmettait le dossier, par l'intermédiaire du Ministère public, au Tribunal de police d'arrondissement de Lausanne.
Statuant le 20 juillet 2015, le tribunal de police a déclaré l'opposition irrecevable pour cause de tardiveté, et dit que celle-ci était exécutoire.
B.
Par arrêt du 31 juillet 2005, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours de X., confirmé le prononcé du 20 juillet 2015, et mis les frais de la cause à la charge du recourant.
C.
X. interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Avec suite de frais et dépens, il conclut, principalement, à la réforme de l'arrêt cantonal en ce sens que l'opposition qu'il a formée le 2 juillet 2015 est déclarée recevable et la cause renvoyée à la préfecture pour
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instruction au sens des considérants; subsidiairement, à l'annulation de l'arrêt du 31 juillet 2015 et au renvoi de la cause à la Chambre des recours pénale pour nouvelle instruction et nouveau jugement dans le sens des considérants.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
Le Tribunal fédéral a admis le recours.
Extrait des considérants:
4.1
En vertu de l'
art. 353 al. 3 CPP
, applicable par analogie à la procédure pénale en matière de contravention (
art. 357 al. 2 CPP
), l'ordonnance pénale est immédiatement notifiée par écrit aux personnes et aux autorités qui ont qualité pour former opposition. Les autorités pénales notifient leurs prononcés par lettre signature ou par tout autre mode de communication impliquant un accusé de réception, notamment par l'entremise de la police (
art. 85 al. 2 CPP
). Le délai d'opposition contre l'ordonnance pénale est de dix jours (cf.
art. 354 al. 1 CPP
). La date de réception étant déterminante pour faire courir le délai d'opposition, la règle de l'
art. 85 al. 2 CPP
se justifie par le fait qu'il faut acquérir la certitude que le prévenu a bien reçu l'ordonnance pénale et qu'il a eu la possibilité de faire opposition (GILLIÉRON/KILLIAS, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2011, n° 14 ad
art. 353 CPP
). En ce sens, elle a une fonction de preuve importante (BRÜSCHWEILER, in Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung [StPO], Donatsch/Hansjakob/Lieber [éd.], 2
e
éd. 2014, n° 3 ad
art. 85 CPP
).
4.2
En l'espèce, il y a lieu de constater - ce que la cour cantonale a omis de faire - qu'en expédiant au recourant l'ordonnance pénale du 10 juin 2015 par pli simple, soit par un mode de communication où il n'y a pas d'accusé de réception, la préfecture a procédé à une notification qui n'est pas conforme à l'
art. 85 al. 2 CPP
. Le Code de procédure pénale ne prévoit pas les conséquences juridiques pouvant découler d'une notification effectuée en violation de cette disposition. Le Message du Conseil fédéral du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale (FF 2006 1057) ne traite pas non plus de cette question. Il convient donc de se référer aux principes jurisprudentiels développés en la matière (voir arrêt 1B_41/2016 du 24 février 2016 consid. 2.1).
BGE 142 IV 125 S. 128
4.3
De jurisprudence constante, le fardeau de la preuve de la notification et de la date de celle-ci incombe en principe à l'autorité qui entend en tirer une conséquence juridique (
ATF 136 V 295
consid. 5.9 p. 309, avec les nombreuses références). L'autorité supporte donc les conséquences de l'absence de preuve en ce sens que si la notification ou sa date sont contestées et qu'il existe effectivement un doute à ce sujet, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l'envoi (
ATF 129 I 8
consid. 2.2 p. 10;
ATF 124 V 400
consid. 2a p. 402; arrêt 6B_ 869/2014 du 18 septembre 2015 consid. 1.2). La preuve de la notification peut néanmoins résulter d'autres indices ou de l'ensemble des circonstances, par exemple un échange de correspondance ultérieur ou le comportement du destinataire (
ATF 105 III 43
consid. 2a p. 46).
4.4
En l'occurrence, on ne saurait suivre la cour cantonale lorsqu'elle tient pour établi que la notification au recourant du pli simple comportant l'ordonnance litigieuse a bien eu lieu au plus tard le 15 juin 2015. Tout d'abord, il est discutable d'attribuer une force de preuve au "Journal des opérations" de la préfecture dès lors que l'on ignore la manière dont celui-ci est tenu. La question peut toutefois rester indécise car même en admettant que la date d'expédition du pli fût bien le 10 juin 2015, la preuve de sa date de réception par le recourant - seule déterminante - ne peut être considérée comme rapportée par la seule référence aux délais usuels d'acheminement des envois postaux. Le Tribunal fédéral a déjà dit qu'une erreur ou un retard dans la distribution du courrier par pli simple ne peuvent être exclus, même s'ils apparaissent improbables (arrêts 9C_744/2012 du 15 janvier 2013 consid. 5.3, in RtiD 2013 II p. 342; 2P.177/2001 du 9 juillet 2002 consid. 1.4). Il est en pratique difficile, pour ne pas dire impossible, d'établir la preuve qu'une communication est parvenue à son destinataire en cas d'envoi sous pli simple (voir JEAN-MAURICE FRÉSARD, Commentaire de la LTF, 2
e
éd. 2014, n° 29 ad.
art. 44 LTF
). C'est bien pour cette raison que l'
art. 85 al. 2 CPP
prescrit une notification par lettre signature (recommandé) ou tout autre mode impliquant un accusé de réception. S'agissant de la présomption sur laquelle la cour cantonale a fondé son raisonnement, elle procède d'une mauvaise compréhension de la jurisprudence. Certes, dans certaines circonstances, l'attitude du destinataire de l'envoi peut constituer un élément d'appréciation susceptible d'être déterminant pour retenir la notification de la décision ou le fait que celle-ci est intervenue avant une certaine date (par exemple: arrêts 5D_62/2014 du 14 octobre 2014;
BGE 142 IV 125 S. 129
9C_202/2014 du 11 juillet 2014; 5A_359/2013 du 15 juillet 2013). Dans le cas particulier cependant, il n'existe aucun indice dont on pourrait inférer que le recourant aurait reçu l'ordonnance litigieuse avant le 23 juin 2015, de sorte qu'il y a lieu de se fonder sur ses déclarations quant à la date de notification de cette ordonnance.
Par conséquent, c'est à tort que la cour cantonale a confirmé la tardiveté de l'opposition du recourant. On doit considérer que celle-ci, formée le 2 juillet 2015, est intervenue dans le délai légal de dix jours fixé à l'
art. 354 al. 1 CPP
. Le recours est bien fondé, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs soulevés. (...)