Loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes
du 24 mars 1995 (Etat le 1er juillet 2020)
L’Assemblée fédérale de la Confédération suisse,
vu les art. 8, al. 3, 110, al. 1, let. a, 122 et 173, al. 2, de la Constitution1,2
vu le message du Conseil fédéral du 24 février 19933,
arrête:
Section 1 But
Art. 1
La présente loi a pour but de promouvoir dans les faits l’égalité entre femmes et hommes.
Section 2 Égalité dans les rapports de travail
Art. 2 Principe
Art. 3 Interdiction de discriminer
1Il est interdit de discriminer les travailleurs à raison du sexe, soit directement, soit indirectement, notamment en se fondant sur leur état civil ou leur situation familiale ou, s’agissant de femmes, leur grossesse.
2L’interdiction de toute discrimination s’applique notamment à l’embauche, à l’attribution des tâches, à l’aménagement des conditions de travail, à la rémunération, à la formation et à la formation continue, à la promotion et à la résiliation des rapports de travail.1
3Ne constituent pas une discrimination les mesures appropriées visant à promouvoir dans les faits l’égalité entre femmes et hommes.
1 Nouvelle teneur selon l’annexe ch. 2 de la LF du 20 juin 2014 sur la formation continue, en vigueur depuis le 1er janv. 2017 (RO 2016 689; FF 2013 3265).
Art. 4 Harcèlement sexuel; discrimination
Par comportement discriminatoire, on entend tout comportement importun de caractère sexuel ou tout autre comportement fondé sur l’appartenance sexuelle, qui porte atteinte à la dignité de la personne sur son lieu de travail, en particulier le fait de proférer des menaces, de promettre des avantages, d’imposer des contraintes ou d’exercer des pressions de toute nature sur une personne en vue d’obtenir d’elle des faveurs de nature sexuelle.
Art. 5 Droits des travailleurs
1Quiconque subit ou risque de subir une discrimination au sens des art. 3 et 4 peut requérir le tribunal ou l’autorité administrative:
- a.
- d’interdire la discrimination ou, d’y renoncer, si elle est imminente;
- b.
- de faire cesser la discrimination, si elle persiste;
- c.
- de constater l’existence de la discrimination, si le trouble qu’elle a créé subsiste;
- d.
- d’ordonner le paiement du salaire dû.
2Lorsque la discrimination porte sur un refus d’embauche ou la résiliation de rapports de travail régis par le code des obligations1, la personne lésée ne peut prétendre qu’au versement d’une indemnité par l’employeur. Celle-ci est fixée compte tenu de toutes les circonstances et calculée sur la base du salaire auquel la personne discriminée avait droit ou aurait vraisemblablement eu droit.
3Lorsque la discrimination porte sur un cas de harcèlement sexuel, le tribunal ou l’autorité administrative peuvent également condamner l’employeur à verser au travailleur une indemnité, à moins que l’employeur ne prouve qu’il a pris les mesures que l’expérience commande, qui sont appropriées aux circonstances et que l’on peut équitablement exiger de lui pour prévenir ces actes ou y mettre fin. L’indemnité est fixée compte tenu de toutes les circonstances et calculée sur la base du salaire moyen suisse.
4En cas de discrimination portant sur un refus d’embauche, l’indemnité prévue à l’al. 2 n’excédera pas le montant correspondant à trois mois de salaire. Lorsque plusieurs personnes prétendent au versement d’une indemnité pour refus d’embauche à un même poste, la somme totale des indemnités versées n’excédera pas non plus ce montant. Lorsque la discrimination porte sur la résiliation de rapports de travail régis par le code des obligations ou sur un cas de harcèlement sexuel, l’indemnité prévue aux al. 2 et 3 n’excédera pas le montant correspondant à six mois de salaire.
5Sont réservés les droits en dommages-intérêts et en réparation du tort moral, de même que les prétentions découlant de dispositions contractuelles plus favorables aux travailleurs.
Art. 6 Allégement du fardeau de la preuve
L’existence d’une discrimination est présumée pour autant que la personne qui s’en prévaut la rende vraisemblable; la présente disposition s’applique à l’attribution des tâches, à l’aménagement des conditions de travail, à la rémunération, à la formation et à la formation continue, à la promotion et à la résiliation des rapports de travail.
1 Nouvelle teneur selon l’annexe ch. 2 de la LF du 20 juin 2014 sur la formation continue, en vigueur depuis le 1er janv. 2017 (RO 2016 689; FF 2013 3265).
Art. 7 Qualité pour agir des organisations
1Les organisations qui sont constituées depuis deux ans au moins et qui ont pour tâche, en vertu de leurs statuts, de promouvoir l’égalité entre femmes et hommes ou de défendre les intérêts des travailleurs ont qualité pour agir en leur propre nom en vue de faire constater une discrimination, lorsqu’il paraît vraisemblable que l’issue du procès affectera un nombre considérable de rapports de travail. Avant d’ouvrir la procédure de conciliation ou d’introduire action, ces organisations doivent donner à l’employeur concerné la possibilité de prendre position.
2Pour le surplus, les dispositions régissant les actions intentées à titre individuel sont applicables par analogie.
Section 3 Dispositions spéciales relatives aux rapports de travail régis par le code des obligations
Art. 8 Procédure en cas de discrimination à l’embauche
1La personne qui n’est pas engagée et qui se prévaut d’une discrimination peut exiger de l’employeur qu’il motive sa décision par écrit.
2La personne qui entend faire valoir son droit à une indemnité au sens de l’art. 5, al. 2, doit agir en justice dans les trois mois à compter du moment où le refus d’embauche lui a été communiqué, sous peine de péremption.
Art. 9 Procédure lors de discrimination dans la résiliation du contrat de travail
Art. 10 Protection contre le congé
1La résiliation du contrat de travail par l’employeur est annulable lorsqu’elle ne repose pas sur un motif justifié et qu’elle fait suite à une réclamation adressée à un supérieur ou à un autre organe compétent au sein de l’entreprise, à l’ouverture d’une procédure de conciliation ou à l’introduction d’une action en justice.
2Le travailleur est protégé contre le congé durant toute la durée des démarches effectuées au sein de l’entreprise, durant la procédure de conciliation et durant toute la durée du procès, de même que pendant le semestre qui suit la clôture des démarches ou de la procédure.
3Le travailleur qui entend contester la résiliation de son contrat de travail doit saisir le tribunal dans le délai du congé. Le juge peut ordonner le réengagement provisoire du travailleur pour la durée de la procédure lorsqu’il paraît vraisemblable que les conditions d’une annulation du congé sont remplies.
4Le travailleur peut renoncer, au cours du procès, à poursuivre les rapports de travail et demander une indemnité au sens de l’art. 336a du code des obligations1 en lieu et place de l’annulation du congé.
5Le présent article est applicable par analogie lorsque le congé a été donné à la suite d’une action judiciaire intentée par une organisation au sens de l’art. 7.
Art. 11 et 12
…
1 Abrogés par l’annexe 1 ch. II 1 du code de procédure civile du 19 déc. 2008, avec effet au 1er janv. 2011 (RO 2010 1739; FF 2006 6841).
Section 4 Voies de droit dans les rapports de travail de droit public
Art. 13
1Dans les rapports de travail de droit public, les voies de droit sont régies par les dispositions générales sur la procédure fédérale. L’art. 58 du statut des fonctionnaires du 30 juin 19271 est applicable s’agissant des recours contre les décisions portant sur les rapports de service du personnel fédéral.
2En cas de discrimination lors de la création de rapports de travail, l’art. 5, al. 2, est applicable. En recourant directement contre la décision de refus d’embauche, les personnes dont la candidature n’a pas été retenue peuvent faire valoir leur droit à une indemnité.
3Le personnel de la Confédération peut, dans le délai de recours prévu à l’art. 50 de la loi du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative2, s’adresser à une commission de conciliation. Cette dernière conseille les parties et tente de les amener à un accord.3
5La procédure est gratuite, sauf en cas de témérité. Pour la procédure devant le Tribunal fédéral, les frais sont régis par la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral5.6
1 [RS 1 459; RO 1958 1483 art. 27 let. c, 1997 2465 appendice ch. 4, 2000 411 ch. II 1853, 2001 894 art. 39 al. 1 2197 art. 2 3292 art. 2. RO 2008 3437 ch. I 1]. Voir actuellement les art. 35 et 36 de la L du 24 mars 2000 sur le personnel de la Confédération (RS 172.220.1).
2 RS 172.021
3 Nouvelle teneur selon le ch. I de la LF du 8 oct. 2004, en vigueur depuis le 1er mars 2005 (RO 2005 1023; FF 2003 7135).
4 Abrogé par l’annexe ch. 1 de la L du 17 juin 2005 sur le TF, avec effet au 1erjanv. 2007 (RO 2006 1205; FF 2001 4000).
5 RS 173.110
6 Phrase introduite par l’annexe ch. 1 de la L du 17 juin 2005 sur le TF, en vigueur depuis le 1er janv. 2007 (RO 2006 1205; FF 2001 4000).
Section 4a Analyse de l’égalité des salaires et vérification
Art. 13a Obligation d’effectuer une analyse
1Les employeurs qui occupent un effectif d’au moins 100 travailleurs au début d’une année effectuent à l’interne une analyse de l’égalité des salaires pour cette même année. Les apprentis ne sont pas comptabilisés dans cet effectif.
2L’analyse de l’égalité des salaires est répétée tous les quatre ans. Si le nombre des travailleurs passe sous le seuil des 100 pendant ce laps de temps, elle n’est répétée que lorsque le chiffre de 100 est de nouveau atteint.
3Si l’analyse de l’égalité des salaires démontre que l’égalité salariale est respectée, l’employeur est libéré de l’obligation de réitérer l’analyse.
Art. 13b Dispense de l’obligation d’effectuer une analyse
Est dispensé d’effectuer une analyse de l’égalité des salaires l’employeur:
- a.
- qui fait l’objet d’un contrôle du respect de l’égalité des salaires dans le cadre d’une procédure d’attribution d’un marché public;
- b.
- qui fait l’objet d’un tel contrôle dans le cadre d’une demande d’octroi de subventions, ou
- c.
- qui a déjà fait l’objet d’un tel contrôle et qui a démontré qu’il satisfaisait aux exigences, pour autant que le mois de référence dudit contrôle ne remonte pas à plus de quatre ans.
Art. 13c Méthode d’analyse
Art. 13d Vérification de l’analyse
1Les employeurs soumis au code des obligations1 font vérifier leur analyse de l’égalité des salaires par un organe indépendant. Ils peuvent faire appel, au choix:
- a.
- à une entreprise de révision agréée au sens de la loi du 16 décembre 2005 sur la surveillance de la révision2;
- b.
- à une organisation au sens de l’art. 7 ou à une représentation des travailleurs au sens de la loi du 17 décembre 1993 sur la participation3.
2Le Conseil fédéral fixe les critères qui régissent la formation des personnes qui dirigent la révision.
3Le Conseil fédéral règle les modalités de la vérification de l’analyse de l’égalité des salaires du personnel de la Confédération.
4Les cantons règlent les modalités de la vérification des analyses de l’égalité des salaires dans leur domaine de compétence.
Art. 13e Vérification par une entreprise de révision agréée
1L’employeur communique à l’entreprise de révision toutes les pièces et informations dont elle a besoin pour procéder à la vérification.
2L’entreprise de révision vérifie que l’analyse a été effectuée correctement sur le plan formel.
3Elle rédige un rapport portant sur l’exécution de l’analyse de l’égalité des salaires à l’intention de la direction de l’entreprise vérifiée dans un délai d’un an après que l’analyse a été effectuée.
Art. 13f Vérification par une organisation ou par une représentation des travailleurs
L’employeur conclut avec l’organisation au sens de l’art. 7 ou la représentation des travailleurs une convention sur la marche à suivre pour la vérification et la remise du rapport à la direction de l’entreprise.
Art. 13g Information des travailleurs
Les employeurs informent les travailleurs par écrit du résultat de l’analyse de l’égalité des salaires au plus tard un an après qu’elle a été vérifiée.
Art. 13h Information des actionnaires
Art. 13i Publication des résultats dans le secteur public
Les employeurs du secteur public publient les résultats détaillés de l’analyse de l’égalité des salaires et de la vérification.
Section 5 Aides financières
Art. 14 Programmes d’encouragement
1La Confédération peut allouer des aides financières à des organisations publiques ou privées qui mettent sur pied des programmes visant à favoriser la réalisation de l’égalité entre femmes et hommes dans la vie professionnelle. Elle peut elle-même mettre sur pied de tels programmes.
2Les programmes peuvent porter notamment sur:
- a.1
- la formation et la formation continue, en cours d’emploi ou non;
- b.
- une meilleure représentation des deux sexes dans les différentes activités professionnelles, à toutes les fonctions et à tous les niveaux;
- c.
- des mesures permettant de mieux concilier les activités professionnelles et les obligations familiales;
- d.
- la mise en place dans l’entreprise d’une forme d’organisation du travail ou d’une infrastructure favorisant l’égalité entre les sexes.
3Les aides financières sont accordées en priorité pour des programmes ayant un caractère exemplaire ou novateur.
1 Nouvelle teneur selon l’annexe ch. 2 de la LF du 20 juin 2014 sur la formation continue, en vigueur depuis le 1er janv. 2017 (RO 2016 689; FF 2013 3265).
Art. 15 Services de consultation
La Confédération peut allouer des aides financières à des organisations privées:
- a.
- qui informent et conseillent les femmes dans la vie professionnelle;
- b.
- qui assistent, en matière de réinsertion professionnelle, les femmes et les hommes ayant interrompu leur activité lucrative pour se consacrer à des tâches familiales.
Section 6 Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes
Art. 16
1Le Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes encourage la réalisation de l’égalité entre les sexes dans tous les domaines et s’emploie à éliminer toute forme de discrimination directe ou indirecte.
2A cet effet, il assume notamment les tâches suivantes:
- a.
- informer la population;
- b.
- conseiller les particuliers et les autorités;
- c.
- procéder à des études et émettre des recommandations à l’intention des autorités et des particuliers;
- d.
- participer, le cas échéant, à des projets d’intérêt national;
- e.
- participer à l’élaboration des actes normatifs édictés par la Confédération, dans la mesure où ils sont pertinents pour la réalisation de l’égalité;
- f.
- traiter les demandes d’aides financières visées aux art. 14 et 15 et contrôler la mise en oeuvre des programmes d’encouragement.
Section 7 Dispositions finales
Art. 17 Disposition transitoire
L’exercice d’une prétention en paiement du salaire dû, en vertu de l’art. 5, al. 1, let. d, est régie par le nouveau droit, lorsque l’action de droit civil a été introduite après l’entrée en vigueur de la présente loi, ou lorsqu’au moment de l’entrée en vigueur, l’autorité compétente de première instance n’a pas encore rendu sa décision.
Art. 17a Disposition transitoire relative à la modification du 14 décembre 2018
1Le Conseil fédéral fixe la date à laquelle les employeurs visés à l’art. 13a doivent avoir effectué la première analyse de l’égalité des salaires.
2Il peut fixer des dates différentes en fonction de la taille des entreprises.
1 Introduit par le ch. I de la LF du 14 déc. 2018, en vigueur du 1erjuil. 2020 au 30 juin 2032 (RO 2019 2815; FF 2017 5169).
Art. 17b Évaluation de l’efficacité
1Le Conseil fédéral veille à ce que l’efficacité des mesures fondées sur les art. 13a à 13i fasse l’objet d’une évaluation.
2Il présente un rapport au Parlement après que la deuxième analyse de l’égalité des salaires a été effectuée, mais au plus tard neuf après l’entrée en vigueur des dispositions visées à l’al. 1.
1 Introduit par le ch. I de la LF du 14 déc. 2018, en vigueur du 1erjuil. 2020 au 30 juin 2032 (RO 2019 2815; FF 2017 5169).