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Art. 745
A. De l’usufruit
I. Son objet
1 L’usufruit peut être établi sur des meubles, des immeubles, des droits ou un patrimoine. 2 Il confère à l’usufruitier, sauf disposition contraire, un droit de jouissance complet sur la chose. 3 L’usufruit d’un immeuble peut être limité à une partie définie d’un bâtiment ou de l’immeuble.605
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Art. 746
II. Constitution de l’usufruit
1. En général
1 L’usufruit des choses mobilières et des créances s’établit par leur transfert à l’usufruitier, celui des immeubles par l’inscription au registre foncier. 2 Les règles concernant la propriété sont applicables, sauf dispositions contraires, à l’acquisition de l’usufruit tant mobilier qu’immobilier et à l’inscription.
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Art. 748
III. Extinction de l’usufruit
1. Causes d’extinction
1 L’usufruit s’éteint par la perte totale de la chose et en outre, s’il s’agit d’immeubles, par la radiation de l’inscription, lorsque celle-ci est nécessaire pour l’établir. 2 D’autres causes d’extinction, telles que l’échéance du terme, la renonciation et la mort de l’usufruitier, ne confèrent au propriétaire, en matière d’usufruit immobilier, que le droit d’exiger la radiation. 3 L’usufruit légal s’éteint avec la cause qui lui a donné naissance.
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Art. 749
1 L’usufruit s’éteint par la mort de l’usufruitier et, si l’usufruitier est une personne morale, par la dissolution de celle-ci. 2 Toutefois, l’usufruit des personnes morales ne peut durer plus de cent ans.
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Art. 750
3. Contre-valeur de la chose détruite
1 Le propriétaire n’est pas tenu de rétablir la chose détruite. 2 S’il la rétablit, l’usufruit renaît. 3 L’usufruit s’étend à la contre-valeur qui a remplacé la chose détruite, notamment en cas d’assurance et d’expropriation pour cause d’utilité publique.
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Art. 751
4. Restitution
a. Obligation
Le possesseur est tenu de rendre la chose au propriétaire dès que l’usufruit a pris fin.
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Art. 752
1 L’usufruitier répond de la perte et de la dépréciation de la chose, s’il ne prouve pas que le dommage est survenu sans sa faute. 2 Il remplace les choses qu’il a consommées sans en avoir le droit. 3 Il ne doit aucune indemnité pour la dépréciation causée par l’usage normal de la chose.
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Art. 753
1 L’usufruitier qui a fait des impenses ou de nouveaux ouvrages sans y être obligé peut réclamer une indemnité à la cessation de l’usufruit, selon les règles de la gestion d’affaires. 2 S’il a fait des installations pour lesquelles le propriétaire refuse de l’indemniser, il a le droit de les enlever, à charge de rétablir l’état antérieur.
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Art. 754
5. Prescription des indemnités
Les droits du propriétaire en raison de changements ou de dépréciations, ceux de l’usufruitier pour ses impenses et la faculté qu’il a d’enlever les installations par lui faites, se prescrivent par une année dès la restitution de la chose.
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Art. 755
IV. Effets de l’usufruit
1. Droits de l’usufruitier
a. En général
1 L’usufruitier a la possession, l’usage et la jouissance de la chose. 2 Il en a aussi la gestion. 3 Il observe, dans l’exercice de ses droits, les règles d’une bonne administration.
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Art. 756
1 Les fruits naturels parvenus à maturité pendant la durée de l’usufruit appartiennent à l’usufruitier. 2 Le propriétaire ou l’usufruitier qui pourvoit à la culture peut exiger pour ses impenses, de celui qui a récolté, une indemnité équitable, qui n’excédera pas la valeur de la récolte. 3 Les parties intégrantes de la chose qui ne sont pas des fruits ou des produits restent acquises au propriétaire.
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Art. 757
Les intérêts des capitaux soumis à l’usufruit et les autres revenus périodiques sont acquis à l’usufruitier du jour où son droit commence jusqu’à celui où il prend fin, même s’ils ne sont exigibles que plus tard.
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Art. 758
d. Cession de l’usufruit
1 L’usufruitier dont le droit n’est pas éminemment personnel peut en transférer l’exercice à un tiers. 2 Dans ce cas, le propriétaire peut agir directement contre le cessionnaire.
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Art. 759
2. Droits du nu-propriétaire
a. Surveillance
Le propriétaire peut s’opposer à tout acte d’usage illicite ou non conforme à la nature de la chose.
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Art. 760
b. Droit d’exiger des sûretés
1 Le propriétaire qui prouve que ses droits sont en péril peut exiger des sûretés de l’usufruitier. 2 Il peut en exiger, même sans faire cette preuve et avant la délivrance, si l’usufruit porte sur des choses consomptibles ou des papiers-valeurs. 3 Si l’usufruit a pour objet des papiers-valeurs, le dépôt des titres suffit.
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Art. 761
c. Sûretés dans les cas de donations et d’usufruits légaux
1 Des sûretés ne peuvent être réclamées du donateur qui s’est réservé l’usufruit de la chose donnée. 2 En matière d’usufruits légaux, l’obligation de fournir des sûretés est soumise à des règles spéciales.
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Art. 762
d. Suites du défaut de fournir des sûretés
Si l’usufruitier ne fournit pas des sûretés dans un délai suffisant, qui lui sera fixé à cet effet, ou si, malgré l’opposition du propriétaire, il continue à faire un usage illicite de la chose, le juge lui retire jusqu’à nouvel ordre la possession des biens pour les remettre à un curateur.
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Art. 763
Le propriétaire et l’usufruitier peuvent exiger en tout temps qu’un inventaire authentique des biens sujets à l’usufruit soit dressé à frais communs.
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Art. 764
4. Obligations de l’usufruitier
a. Conservation de la chose
1 L’usufruitier est tenu de conserver la substance de la chose et de faire lui-même les réparations et réfections ordinaires d’entretien. 2 Si des travaux plus importants ou d’autres mesures sont indispensables à la conservation de la chose, l’usufruitier est tenu d’en aviser le propriétaire et de les souffrir. 3 Il peut y pourvoir lui-même, aux frais du propriétaire, si ce dernier ne fait pas le nécessaire.
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Art. 765
b. Dépenses d’entretien, impôts et autres charges
1 L’usufruitier supporte les frais ordinaires d’entretien et les dépenses d’exploitation de la chose, ainsi que les intérêts des dettes dont elle est grevée, et il est tenu d’acquitter les impôts et autres redevances; le tout en proportion de la durée de son droit. 2 Si les impôts ou d’autres redevances sont acquittés par le propriétaire, l’usufruitier l’en indemnise dans la mesure indiquée. 3 Les autres charges incombent au propriétaire, qui peut toutefois, pour les payer, réaliser des biens sujets à l’usufruit, si les fonds nécessaires ne lui sont à sa demande avancés gratuitement par l’usufruitier.
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Art. 766
c. Intérêts des dettes d’un patrimoine
L’usufruitier d’un patrimoine paie les intérêts des dettes qui le grèvent, mais il peut demander, si les circonstances l’y autorisent, à être dispensé de cette obligation; dans ce cas, sa jouissance est réduite au surplus des biens après acquittement des dettes.
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Art. 767
1 L’usufruitier est tenu d’assurer la chose, dans l’intérêt du propriétaire, contre l’incendie et d’autres risques, en tant que cette mesure rentre d’après l’usage local dans celles que commande une bonne administration. 2 Il paie les primes pour la durée de sa jouissance; cette obligation lui incombe également, si l’usufruit comprend des choses déjà assurées.
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Art. 768
V. Cas spéciaux d’usufruit
1. Immeubles
a. Quant aux fruits
1 L’usufruitier d’un immeuble doit veiller à ce que la jouissance de la chose ne soit pas excessive. 2 Les fruits indûment perçus appartiennent au propriétaire.
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Art. 769
b. Destination de la chose
1 L’usufruitier ne doit apporter à la destination de l’immeuble aucun changement qui puisse causer un préjudice notable au propriétaire. 2 Il ne peut, en particulier, ni transformer, ni essentiellement modifier la chose soumise à l’usufruit. 3 Il ne peut ouvrir des carrières, marnières ou tourbières, ni commencer l’exploitation d’autres choses semblables qu’après avis donné au propriétaire et que si la destination du fonds n’est pas essentiellement modifiée.
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Art. 770
1 L’usufruitier d’une forêt a le droit d’en jouir dans les limites d’un aménagement rationnel. 2 Le propriétaire et l’usufruitier peuvent exiger que l’exploitation soit réglée par un aménagement tenant compte de leurs droits. 3 Lorsque, par suite de tempêtes, chutes de neige, incendie, invasion d’insectes, ou pour d’autres causes, il y a lieu de réaliser une quantité de bois notablement supérieure à la jouissance ordinaire, l’exploitation est réduite de manière à réparer graduellement le dommage ou l’aménagement est adapté aux circonstances nouvelles; le prix du bois réalisé au delà de la jouissance ordinaire est placé à intérêt et sert à compenser la diminution du rendement.
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Art. 771
L’usufruit des choses dont la jouissance consiste dans l’extraction de parties intégrantes du sol, notamment celui des mines, est soumis aux règles concernant l’usufruit des forêts.
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Art. 772
2. Choses consomptibles et choses évaluées
1 Les choses qui se consomment par l’usage deviennent, sauf disposition contraire, la propriété de l’usufruitier, qui demeure comptable de leur valeur au début de l’usufruit. 2 À moins que le contraire n’ait été prévu, l’usufruitier peut disposer librement des autres choses mobilières estimées lors de leur remise, mais il devient comptable de leur valeur s’il exerce ce droit. 3 L’usufruitier peut rendre au propriétaire des choses de même espèce et qualité, s’il s’agit d’un matériel d’exploitation agricole, d’un troupeau, d’un fonds de marchandises ou d’autres choses semblables.
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Art. 773
3. Créances
a. Étendue de la jouissance
1 L’usufruit d’une créance donne le droit d’en percevoir les revenus. 2 Toute dénonciation de remboursement, tout acte de disposition concernant les papiers-valeurs soumis à l’usufruit doivent être faits par le propriétaire et l’usufruitier conjointement; le débiteur dénonce le remboursement à l’un et à l’autre. 3 Lorsque la créance est compromise, le propriétaire et l’usufruitier ont le droit d’exiger l’adhésion l’un de l’autre aux mesures commandées par une bonne gestion.
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Art. 774
b. Remboursements et remplois
1 Le débiteur qui n’a pas été autorisé à se libérer entre les mains soit du propriétaire, soit de l’usufruitier, doit payer à tous les deux conjointement ou consigner. 2 L’objet de la prestation, notamment le capital remboursé, est soumis à la jouissance de l’usufruitier. 3 Le propriétaire et l’usufruitier ont le droit d’exiger que les capitaux soient placés en titres sûrs et productifs d’intérêts.
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Art. 775
c. Droit au transfert des créances
1 L’usufruitier peut exiger, dans les trois mois à compter du début de l’usufruit, la cession des créances et papiers-valeurs sujets à son droit. 2 Si la cession a lieu, il devient débiteur envers le propriétaire de la valeur des créances et papiers-valeurs au moment du transfert et il est tenu de fournir des sûretés de ce chef, à moins que le propriétaire n’ait renoncé à en réclamer. 3 Si le propriétaire n’a pas renoncé à exiger des sûretés, le transfert de la propriété n’a lieu qu’après qu’elles ont été fournies.
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Art. 776
B. Droit d’habitation
I. En général
1 Le droit d’habitation est le droit de demeurer dans une maison ou d’en occuper une partie. 2 Il est incessible et ne passe point aux héritiers. 3 Les règles de l’usufruit sont applicables, sauf disposition contraire de la loi.
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Art. 777
II. Étendue du droit d’habitation
1 L’étendue du droit d’habitation est réglée en général par les besoins personnels de celui auquel il appartient. 2 Ce droit comprend, s’il n’a été expressément limité à la personne de celui à qui il a été concédé, la faculté pour ce dernier d’habiter l’immeuble grevé avec sa famille et les gens de sa maison. 3 Celui qui possède un droit d’habitation sur une partie seulement d’un bâtiment jouit des installations destinées à l’usage commun.
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Art. 778
1 L’ayant droit est chargé des réparations ordinaires d’entretien, s’il a la jouissance exclusive de la maison ou de l’appartement. 2 Si le droit d’habitation s’exerce en commun avec le propriétaire, les frais d’entretien incombent à ce dernier.
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Art. 779
C. Droit de superficie
I. Objet et immatriculation au registre foncier
1 Le propriétaire peut établir en faveur d’un tiers une servitude lui conférant le droit d’avoir ou de faire des constructions soit sur le fonds grevé, soit au-dessous. 2 Sauf convention contraire, ce droit est cessible et passe aux héritiers. 3 Si cette servitude a le caractère d’un droit distinct et permanent, elle peut être immatriculée comme immeuble au registre foncier.
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Art. 779a608
1 L’acte constitutif d’un droit de superficie n’est valable que s’il a été passé en la forme authentique. 2 La rente du droit de superficie et les éventuelles autres dispositions contractuelles doivent être passées en la forme authentique lorsqu’il est prévu de les annoter au registre foncier. 608Introduit par le ch. I de la LF du 19 mars 1965 (RO 1965 449; FF 1963 I 993). Nouvelle teneur selon le ch. I 1 de la LF du 11 déc. 2009 (Cédule hypothécaire de registre et droits réels), en vigueur depuis le 1er janv. 2012 (RO 2011 4637; FF 2007 5015).
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Art. 779b610
III. Contenu, étendue et annotation
1 Les dispositions contractuelles sur les effets et l’étendue du droit de superficie, notamment sur la situation, la structure, le volume et la destination des constructions, ainsi que sur l’utilisation des surfaces non bâties mises à contribution par l’exercice du droit, sont obligatoires pour tout acquéreur du droit de superficie et de l’immeuble grevé. 2 Si les parties en conviennent, d’autres dispositions contractuelles peuvent être annotées au registre foncier.611 610Introduit par le ch. I de la LF du 19 mars 1965, en vigueur depuis le 1er juil. 1965 (RO 1965 449; FF 1963 I 993). 611 Introduit par le ch. I 1 de la LF du 11 déc. 2009 (Cédule hypothécaire de registre et droits réels), en vigueur depuis le 1er janv. 2012 (RO 2011 4637; FF 2007 5015).
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Art. 779c612
IV. Effets à l’expiration de la durée
1. Retour des constructions
À l’expiration du droit de superficie, les constructions font retour au propriétaire du fonds et deviennent partie intégrante de ce fonds.
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Art. 779d613
1 Pour les constructions lui faisant retour, le propriétaire du fonds verse au superficiaire une indemnité équitable qui constitue cependant, pour les créanciers en faveur desquels le droit de superficie était grevé de gage, une garantie pour le solde de leurs créances et qui ne peut pas être versée au superficiaire sans leur consentement. 2 Si l’indemnité n’est ni versée ni garantie, le superficiaire ou un créancier en faveur duquel le droit de superficie était grevé de gage peut exiger qu’au lieu du droit de superficie radié une hypothèque de même rang soit inscrite en garantie de l’indemnité due. 3 L’inscription doit se faire au plus tard trois mois après l’expiration du droit de superficie.
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Art. 779f615
V. Retour anticipé
1. Conditions
Si le superficiaire excède gravement son droit réel ou viole gravement des obligations contractuelles, le propriétaire peut provoquer le retour anticipé en demandant le transfert à son nom du droit de superficie avec tous les droits et charges qui y sont attachés.
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Art. 779g616
2. Exercice du droit de retour
1 Le droit de retour ne peut être exercé que moyennant une indemnité équitable pour les constructions qui font retour au propriétaire, la faute du superficiaire pouvant justifier la réduction de l’indemnité. 2 Le droit de superficie n’est transféré au propriétaire que si l’indemnité a été versée ou garantie.
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Art. 779h617
3. Autres cas d’application
Les dispositions concernant l’exercice du droit de retour s’appliquent à tout moyen que le propriétaire s’est réservé de mettre fin prématurément au droit de superficie ou d’en demander la rétrocession en cas de violation de ses obligations par le superficiaire.
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Art. 779i618
VI. Garantie de la rente du droit de superficie
1. Droit d’exiger la constitution d’une hypothèque
1 Le propriétaire peut demander à tout superficiaire actuel de garantir la rente du droit de superficie au moyen d’une hypothèque grevant pour trois annuités au maximum le droit de superficie immatriculé au registre foncier. 2 Si la rente ne consiste pas en annuités égales, l’inscription de l’hypothèque légale peut être requise pour le montant qui, la rente étant uniformément répartie, représente trois annuités.
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Art. 779k619
1 L’hypothèque peut être inscrite en tout temps pendant la durée du droit de superficie et, en cas de réalisation forcée, elle n’est pas radiée. 2 Les dispositions relatives à la constitution de l’hypothèque des artisans et entrepreneurs s’appliquent par analogie.
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Art. 779l620
1 Le droit de superficie ne peut pas être constitué pour plus de cent ans comme droit distinct. 2 Il peut en tout temps être prolongé, en la forme prescrite pour sa constitution, pour une nouvelle durée maximum de cent ans, mais tout engagement pris d’avance à ce sujet est nul.
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Art. 780
D. Droit à une source sur fonds d’autrui
1 Le droit à une source sur fonds d’autrui oblige le propriétaire de ce fonds à permettre l’appropriation et la dérivation de l’eau. 2 Sauf convention contraire, ce droit est cessible et passe aux héritiers. 3 Si la servitude a le caractère d’un droit distinct et permanent, elle peut être immatriculée comme immeuble au registre foncier.
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Art. 781
1 Le propriétaire peut établir, en faveur d’une personne quelconque ou d’une collectivité, d’autres servitudes sur son fonds, à la condition que le fonds se prête à une jouissance déterminée, par exemple, pour des exercices de tir ou pour un passage. 2 Ces droits sont incessibles, sauf convention contraire, et l’étendue en est réglée sur les besoins ordinaires de l’ayant droit. 3 Les dispositions concernant les servitudes foncières sont d’ailleurs applicables.
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Art. 781a621
F. Mesures judiciaires
Si le propriétaire est introuvable ou que les organes prescrits d’une personne morale ou d’une autre entité juridique font défaut, les dispositions sur les mesures judiciaires sont applicables par analogie aux ayants droit d’une servitude inscrits au registre foncier. 621 Introduit par le ch. I 1 de la LF du 11 déc. 2009 (Cédule hypothécaire de registre et droits réels), en vigueur depuis le 1er janv. 2012 (RO 2011 4637; FF 2007 5015).
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